L’ALGÉRIE ET LA FRANCE :
LA RELATION OBLIGÉE

Par Yves Bonnet,
Préfet de région honoraire,
Ancien président du groupe d’amitié parlementaire France-Algérie 

 

Les relations entre l’Algérie et la France ne datent pas d’hier, elles commencèrent avec François 1er et dans l’époque contemporaine dès 1827 des liens et des oppositions ce sont développés entre les deux pays, comment peuvent-ils évolués ?

C’est l’objet de ce HUMEURS du n° spécial : ALGERIE :APRES BOUTEFLIKA ?

Les Français participent-ils encore à la gestion de leurs affaires ? Ceux qui l’affirment excipent de la bonne santé de la démocratie locale, avec nos plus de 35 000 communes, nos 50 000 élus locaux, nos deux (plus une) assemblées et notre président élu au suffrage universel qui se rend désormais annuellement devant le Congrès pour une communication solennelle.

Ceux qui le dénient, en revanche, mettent en avant la personnalisation du pouvoir, caricaturée par la mission confiée à un incompétent irresponsable d’assurer la sécurité du chef de l’Etat, les décisions imposées sans réelle consultation parlementaire ou la restriction du droit de recours ouvert aux citoyens contre les décisions de l’Etat comme cela se prépare en matière d’implantation d’éoliennes.

C’est évidemment un sujet capital quand l’explosion des réseaux sociaux contrôlés par des opérateurs privés et étrangers donne l’illusion d’une ouverture d’un dialogue dont les règles ne sont même pas définies. Mais c’est surtout un enjeu fondamental quand le dialogue gouvernants – gouvernés s’appauvrit pour une raison élémentaire : le refus ou l’incapacité des détenteurs du pouvoir à définir leur ligne politique, à afficher leurs priorités, en bref, à prendre leurs mandants pour des adultes responsables et non pour des écoliers interdits dans tous les sens du terme.

Les trois premiers présidents élus au suffrage universel s’étaient pourtant essayés à l’exercice de l’explication de leur politique : Charles De Gaulle, Georges Pompidou et Valéry Giscard d’Estaing ont régulièrement fait œuvre de pédagogie et pris le temps d’expliquer où ils allaient …et nous avec. Le dernier, qui excellait dans la démonstration, avait porté la pratique à un niveau élevé de persuasion et nous savions alors quels étaient les grands choix de la France, en particulier dans les domaines de l’énergie, de la défense, du commerce extérieur et de la construction européenne.

François Mitterrand ne s’y risqua pas, pour des raisons qui n’appartiennent qu’à lui, mais qui tiennent sans doute à l’accentuation de la dérive monarchique de la France ; Jacques Chirac et sa politique du chien crevé au fil de l’eau ne rectifia pas le cap ; Nicolas Sarkozy fut tenté de revenir à la définition de choix clairs mais oublia de l’expliquer aux Français puis s’enferra tout seul dans une restitution de la politique de la canonnière avec l’expédition calamiteuse en Libye et le soutien à un printemps arabe justement dénoncé comme hiver islamique par Jean-Yves Le Drian. Que son successeur ait fait pire encore ne le dédouane pas de d’être manqué à lui-même avant de le faire aux Français.

Or, Nicolas Sarkozy avait pris un bon départ en proposant clairement pour la France une politique méditerranéenne qui répondait à nos intérêts, était compatible avec nos capacités et ne portait ombrage à aucune grande puissance.

Pour bien comprendre la portée d’une politique méditerranéenne, en effet, il faut et il suffit d’acter notre position dans le monde : admise au Conseil de sécurité de l’ONU en qualité de membre permanent, détentrice l’arme nucléaire et membre, de ce fait, du club des EDAN ( Etats détenteurs de l’arme nucléaire ), première puissance du monde en matière de nucléaire civil, pays compétitif en matière d’exportations agroalimentaires, de constructions navales, d’armement, notre pays pourrait se poser en puissance moyenne « considérable » au sens premier du mot, et jouer, dans sa sphère géographique d’influence un rôle à la mesure de sa capacité. Ni plus, ni moins.

Or notre sphère d’influence est double, européenne et méditerranéenne : nous sommes comme pays fondateur de l’Union européenne et initiateur de toutes les avancées telles que le marché commun, l’euro, la libre circulation des biens et des personnes, un des deux pionniers de sa construction, même interrompue ; en Méditerranée, nous sommes l’interlocuteur naturel du Maghreb, et son terrain d’expansion migratoire naturel. La vision de Nicolas Sarkozy était donc intelligente et de bon sens : que ne l’a-t-il mise en œuvre au lieu de partir guerroyer en Libye sous l’influence d’un philosophe autoproclamé dont un des derniers coups d’éclat a été d’appeler les Algériens à descendre dans la rue pour chasser leur gouvernement et laisser la place au printemps arabe ?

Les faits finissent toujours par commander : devenu terre d’influence française, le Maghreb ne peut se passer de la France, pas davantage que la France ne le peut du Maghreb. Nous y sommes incontournables, et l’immigration constante arrime toujours plus étroitement l’Europe méditerranéenne à l’Afrique nord saharienne. Personne n’est en mesure d’interrompre un processus qui sera perçu dans quelques siècles ou millénaires comme un retour des grandes invasions du début de notre ère. Il faut donc, non pas s’y résigner, mais l’utiliser, le domestiquer, le faire fructifier. On ne peut que subir la dérive des continents, on doit équilibrer celle des peuples et des nations.

Or nul peuple mieux que le français ne dispose d’autant d’atouts pour faire admettre l’algérien en Europe ; nul peuple mieux que l’algérien n’a autant de moyens de faciliter l’entrée de l’Europe dans le sillage de la France sur le sous-continent nord-africain. Que les sceptiques de tous bords aux inspirations contradictoires s’y résignent : aujourd’hui, il est devenu impossible de séparer les deux pays. Les islamistes du GIA et du FIS y ont échoué, les héritiers de l’OAS aussi, et même bien avant eux.

Mal attelés ? peut-être parfois, mais attelés tout de même, et si la loi qui veut que les peuples se rapprochent davantage qu’ils ne se divisent se confirme, l’entente deviendra indissociable.

 

 



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