Le soldat augmenté

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Hugo Marneffe (*)
Journaliste stagiaire chez Espritsurcouf

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Le fusil à tirer dans les coins, ce n’est plus une blague traditionnelle, c’est une réalité (même en plein brouillard, comme le prouve la photo ci-dessus), une réalité apportée par le système « félin » qui équipe désormais le fantassin français. On appelle cela une augmentation.
Les progrès scientifiques et techniques permettent d’en imaginer sous de multiples formes. L’augmentation est un concept complexe mais essentiel pour les armées, qui y voient un outil indispensable pour les conflits à venir.
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’augmentation est le recours à l’ensemble des outils scientifiques et technologiques qui vise à créer ou accroitre les capacités physiques ou psycho-cérébrales d’un individu au-delà de ce que sa nature humaine lui permet normalement. L’augmentation se distingue alors de l’amélioration, qui consiste seulement à stimuler des capacités existantes, même si le seuil entre les deux est parfois difficile à identifier.

Les augmentations peuvent être classées de différentes manières, la plus évidente est celle qui distingue les augmentations non-invasives, et les invasives. Ces dernières, qui pénètrent le corps de l’individu, sont pour beaucoup relativement nouvelles, car dans ce domaine la science progresse chaque jour. On peut citer l’implantation de puces, la chirurgie ou la transformation génétique. Parmi les augmentations non-invasives, on retrouve les exosquelettes, les casques ou les jumelles. D’une manière ou d’une autre, les augmentations doivent faire corps avec le soldat.

Si les grandes puissances mondiales s’y intéressent, c’est évidemment afin de maintenir une supériorité ou une parité opérationnelle entre elles. Dotés d’augmentations, les soldats seront capables de mieux gérer le stress, d’être plus performant physiquement et de mieux appréhender leur environnement pour mieux réagir. Autre avantage, non négligeable, les augmentations sont susceptibles de réduire les pertes humaines, devenues inacceptables dans la plupart des sociétés modernes.

France : un cadre éthique

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Comme l’a expliqué la ministre des Armées Florence Parly en décembre 2020 après les conclusions du comité d’éthique, la France se lance dans des recherches pour l’augmentation des soldats. Elle s’impose cependant, comme stricte limite, le rejet de tout emploi de techniques invasives et irréversibles liées à des implants ou opérations chirurgicales. Des alternatives seront alors privilégiées, même si le franchissement de la barrière du corps est permis pour la prise de caféine, d’antipaludéens, de vaccins et d’antidouleurs.

La France tient à montrer la voie sur les questions éthiques, et insiste notamment sur la réversibilité de l’augmentation, mais aussi sur le consentement et la protection de la dignité des soldats. Puisque le risque que fait peser la compétition internationale ne permet pas de totalement rejeter la possibilité de moyens invasifs dans l’avenir, ceux-ci devront dès lors être strictement contrôlés. Il faut noter que des tentatives de construction d’une éthique européenne existent, notamment à travers les recherches de l’Euro-ISME (International Society for Military Ethics in Europe)

Aujourd’hui, la France recourt à des augmentations externes, comme c’est le cas avec l’équipement félin comprenant notamment des systèmes de localisation acoustique et de robots téléguidés. De nombreuses recherches sont le résultat de collaboration entre entreprises privées et l’agence de l’innovation de défense. C’est notamment le cas de l’entreprise Caylar qui travaille sur une ceinture qui communiquerait des informations aux soldats par le biais de vibrations. L’armée finalise aussi le programme Scorpion qui permettra de fournir aux soldats une meilleure lecture des combats.

USA : la suprématie mondiale

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Les Etats-Unis ont pris de l’avance dans la recherche des soldats augmentés grâce à la focalisation précoce, dès les années 1990, de la DARPA (Defense Advanced Research Projects Agency). Celle-ci a mis en route de nombreux projets qui sont en développement. L’un d’entre eux étant un projet d’exosquelette TALOS qui n’a pas l’inconvénient de limiter excessivement les mouvements des soldats et qui contient un écran de réalité augmenté. On pourrait aussi citer le programme Z-Man pour escalader des murs verticaux, des casques à ultrason pour stimuler des zones du cerveau, des lentilles connectées ou encore une pilule pour limiter la baisse des performances avec l’âge. Des recherches liées à l’ingénierie génétique existent aussi mais peu d’informations sont disponibles à leur sujet.

Cependant, les autorités d’outre atlantique ont pris du retard dans les réflexions  éthiques. En effet, le pays est traversé par des débats entre les trans-humanistes qui croient que tout moyen est bon pour parfaire l’Homme, et les technophobes qui, inquiets pour la nature de l’Homme, invitent à plus de considérations sur les problèmes moraux et sont favorables à une régulation de la part des pouvoirs publics. Par ailleurs, les recherches éthiques des alliés occidentaux poussent aussi les Etats-Unis à se mettre à jours. Ainsi, si quelques réflexions éthiques sont présentes, elles n’ont pas donné lieu, pour l’instant, à une doctrine officielle.

Mais il reste un problème de taille : la pression mise par les adversaires stratégiques, notamment la Chine et la Russie. Il y a de sérieux doutes sur la volonté de ces derniers de limiter le développement de leurs capacités. Dès lors, les américains mettent en avant l’impératif de ne pas perdre leur supériorité stratégique.

Russie : sans limite ?

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La Russie cherche à rattraper son retard sur les Etats-Unis. Les russes développent eux-aussi leur exosquelette avec des caractéristiques similaires à celle des Américains. Il s’agit de la combinaison de combat Ratnik-3 lancée en 2015, développée par l’institut TsNIIMash. Elle donne la capacité de soulever des charges très lourdes, et est aussi doté d’un écran qui fournit des informations tactiques.

En 2017, le Président de la Fédération de Russie, Vladimir Poutine, a annoncé vouloir développer des soldats augmentés en autorisant les manipulations génétiques. Cela signifie que la dynamique russe est d’accepter tous les risques et toutes les dérives en la matière. Et il semble bien que le Kremlin n’impose pas de strictes restrictions sur la recherche, d’autant qu’il ambitionne de faire de la Russie une pionnière des nouvelles technologies militaires.

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(*) Hugo Marneffe. Diplômé d’un Bachelor de Relations Internationales et de Sciences Politiques. Il effectue actuellement un Master de Diplomatie au sein de l’École des Hautes Études Internationales et Politiques de Paris et prépare une thèse sur les nationalismes dans l’Union Européenne. Engagé dans le domaine associatif, il s’investit au sein de la Fédération Francophone de Débat. Il est Journaliste-stagiaire chez ESPRITSURCOUF

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