150 DJIHADISTES À « RAPATRIER »
de Xavier Raufer
Criminologue
LES 150 DJIHADISTES À RAPATRIER DE SYRIE : CE QUE CELA NOUS ENSEIGNE
A mesure où le comptage des djihadis (et de leurs familles) s’opère dans les camps de détention du « Kurdistan syrien », un chiffre émerge : 150 hommes femmes et enfants rentreraient en France dans les semaines à venir. Pourquoi ? Nous le voyons plus bas.
Mais retenons d’abord les conditions incroyables de ce rapatriement, opéré, lit-on, par une logistique et une garde militaire américaine.
Ainsi éclate au grand jour ce que l’auteur dénonce de longue date. Enlisée en Syrie, la France n’a pas la capacité d’opérer seule son repli ; les hommes bien sûr mais aussi le matériel – le retour en bon ordre du tout, permettant seul d’éviter une triste débâcle.
Or non seulement la France de MM. Hollande-Macron n’a pas les moyens de sortir du pétrin syrien dans lequel elle s’est (arrogance, aveuglement, ignorance…) fourrée, mais elle n’a pas pas même les moyens de rapatrier 150 hommes femmes et enfants – ce que toute modeste compagnie aérienne assure aisément au quotidien.
Dépassons le fumet de « république bananière » qu’exhale cette piteuse impuissance logistique. Pour en venir à la confiance – quand même un peu aveugle – accordée aux Etats-Unis, dans le champ Irako-Syrien, par les successifs présidents Hollande et Macron.
Or en diplomatie surtout, l’amitié ne doit pas exclure la lucidité ; celle-ci nous dicte que les Etats-Unis d’Amérique sont peu doués pour les guerres néocoloniales ; toutes les leurs (grandes ou petites) tournant au désastre : Vietnam, Somalie, Irak, etc. Même la « Guerre mondiale au terrorisme » (Global War On Terror, GWOT), inlassablement menée depuis le président GW Bush, finit mal. Une récente étude (du Center for Strategic and International Studies, de Washington) établit ainsi que le monde compte, fin 2018 (chiffrage minimal) trois fois plus de terroristes djihadistes (± 100 000) qu’en 2001, lors des attentats du 11 septembre (± 37 000).
Ce piètre résultat a coûté à Washington 5 900 milliards de dollars. Et si même la guerre s’achevait net, resteraient pour 2019-2023, 808 milliards de dollars de dépenses induites.
Mieux vaut ainsi éviter de suivre le Pentagone dans ces aventures. Plus, l’inévitable lassitude : car à la fin, l’armée US rentre au bercail, abandonnant alliés, frères d’armes et mercenaires locaux.
De fait : en janvier passé à Washington, le général Mattis, alors ministre de la défense, proclame qu’en Afghanistan, Syrie, Irak, le contre-terrorisme, c’est fini. Back to basics : la superpuissance US lutte désormais stratégiquement contre la Russie et la Chine. Les alliés, supplétifs, employés, restés en Syrie ? Bonne chance, bye-bye.
D’où, la nécessité de rapatrier ces 150 terroristes et leurs harems – tous d’ailleurs connus du gouvernement français, qui (hommes, femmes, environ une moitié d’enfants) en a la liste détaillée – même s’il ne la publie pas (pourquoi ?)
– Cynisme ? Ignorance ? Désir atlantiste d’être l’allié indispensable ? Pressions plus vicieuses ? Les présidents Hollande et Macron sont donc entrés dans l’alliance bricolée après les attentats de 2015 pour « anéantir l’Etat-Islamique ».
Lors des combats au sol, suivant la débâcle de l’Etat islamique, les djihadis étrangers égaillés dans la région ont été ramassés par les supplétives « Forces démocratiques syriennes ». Bien sûr, ces guerriers kurdes haïssent ces fanatiques étrangers et n’ont pas trop envie d’être leurs geôliers – mais les Grands Chefs du camp du Bien respectent les droits de l’homme – donc, prisonniers ils sont restés dans des camps, jusqu’à ce jour.
Notons qu’alors, l’axe Iran-Syrie (milices chi’ites irakiennes, Hezbollah, etc.) est plus expéditif : après leurs batailles, les prisonniers étrangers n’abondent pas. A la reprise de Mossoul, nombre de ces djihadis – dont des groupes de ‘Français » – ont ainsi « disparu ».
Or l’armée américaine amorce son départ de Syrie. Forcément, la France suivra, comme vu plus haut. Mais que faire des 150 islamistes détenus au « Kurdistan syrien » ? Les laisser sur place ? Les Kurdes risquent de s’en « débarrasser ». Et comme aujourd’hui tout se sait, le gouvernement Macron-Philippe serait cloué au pilori médiatique pour ces probables exactions – ou massacres. D’où, le rapatriement de ces djihadis, au piteux prétexte qu’ainsi, « on saura où ils sont ».
Tels sont les résultats d’une constamment brouillonne et velléitaire politique proche-orientale, depuis le début du quinquennat Hollande. Les attentats terroristes et les morts sur le sol français d’abord ; désormais, les zonards du Djihad sur les bras.
(*) Xavier Raufer
enseigne au Master – sciences criminelles & criminologie au Conservatoire national des Arts et Métiers (CNAM).Il est professeur associé :
. à l’institut de recherche sur le terrorisme, Université Fu Dan, Shanghai, Chine.
. à l’université George Mason (Washington DC), centre de lutte contre le terrorisme, la criminalité transnationale et la corruption.
Xavier Raufer écrit régulièrement dans http://www.atlantico.fr/
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