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À l’occasion de la parution d’un ouvrage consacré à la Direction de la Surveillance du territoire (DST), Jean-François Clair, co-auteur, revient sur la nature même de ce service dont la genèse remonte à 1944, sans perdre de son importance…bien au contraire.

 

Les Éditions Mareuil ont publié, le 13 Juin 2024, le livre La DST sur le Front de la guerre contre le Terrorisme coécrit par trois anciens responsables de la Lutte contre le terrorisme de ce service : Louis Caprioli, Michel Guérin et Jean-François Clair.

L’ouvrage « couvre » toute sa période d’existence, depuis sa création en novembre 1944 jusqu’en 2008, date de son remplacement par la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) qui a regroupé ses effectifs et une partie des anciens Renseignements généraux (RG).

En 2014, la DCRI est devenue la Direction générale de la Sécurité intérieure (DGSI) qui dépend désormais directement du Ministre de l’Intérieur, à l’instar de la DGSR, pour la sécurité extérieure, du Ministre de la Défense. Un service du renseignement territorial, devenu depuis direction, complète désormais le dispositif.

Les créateurs la Direction de la Surveillance du territoire n’imaginaient pas devoir faire face au terrorisme. Car, initialement, la DST avait pour mission de lutter contre les ingérences étrangères en France menées essentiellement à des fins d’espionnage ; lutte qui devint cruciale durant la guerre froide.

Une empreinte à travers l’Histoire contemporaine

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La première mission qui l’a mobilisée pendant plusieurs années fut l’élucidation et le règlement des séquelles de la Seconde Guerre mondiale et, en l’espèce, des nombreux cas d’individus signalés ou dénoncés comme ayant travaillé pour les Allemands ; un travail énorme.

Avec la guerre d’Algérie, la DST, en tant que service de sécurité, doit s’adapter à toutes les formes de menaces sérieuses. De 1954 jusqu’à 1962, elle a ainsi dû consacrer près de 80% de ses effectifs et moyens à la lutte contre le Front de libération nationale (FLN) en Algérie et en Métropole.

Dans l’ouvrage, les auteurs évoquent ainsi cette période et le travail particulièrement efficace qui fut mené aux côtés d’autres services, y compris dans la lutte contre l’OAS (Organisation de l’armée secrète).

À partir de 1962, le service put se consacrer pleinement au contre-espionnage, principalement contre les Soviétiques, leurs alliés du Pacte de Varsovie comme ceux des pays satellites. Ce thème a fait l’objet d’un précédent livre que nous avons publié en octobre 2022 : La DST sur le Front de la guerre froide présenté dans le numéro 203 D’ESPRITSURCOUF

 

C’est alors au début des années soixante-dix que la situation au Proche Orient s’est aggravée avec la question palestinienne, l’apparition du terrorisme inhérent et ses répercussions croissantes à l’étranger.

Le poids du terrorisme islamique

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La France fut particulièrement impactée, dès 1972. Le livre relate ainsi toute cette période et celle des années quatre-vingt qui marquent un « point d’orgue de la menace » sur notre sol et contre nos ressortissants à l’étranger. La sanglante prise d’otages, lors des jeux olympiques de Munich en 1972 par Septembre Noir, entraîne des opérations de représailles israéliennes dont plusieurs sont menées en France. La première, dès la fin de la même année, via le représentant de L’OLP.

 

Survient plus tard, au tout début des années quatre-vingt-dix, une nouvelle forme de terrorisme qui se revendique du djihad et constitue aujourd’hui la principale menace.

En décembre 2013, nous démantelons une cellule extrémiste turque liée aux Palestiniens dotée d’une « base armée » en banlieue parisienne.

Autant d’actions et de menaces qui poussent la DST à créer une division spécifique pour traiter du terrorisme international. Dotée de moyens limités au départ, elle fera face même si malheureusement, en 1975, elle déplore le meurtre de deux de nos officiers par Carlos.

Avec l’attentat contre la synagogue de la rue Copernic en 1980, un autre contre le restaurant Goldenberg rue des Rosiers en 1982, puis l’attentat à la bombe à l’aéroport d’Orly en 1983, les organisations s’en prennent à la population, tandis que des citoyens français sont frappés à l’étranger (Drakkar à Beyrouth la même année). La menace va s’amplifier avec autant d’effets meurtriers (attentats de 1985 et 1986, dans des lieux publics à Paris).

 

Le livre décrit la façon dont nous nous sommes adaptés et les résultats que nous avons obtenus ; évolution structurelle, obtention d’une législation antiterroriste qui sera sans cesse complétée, meilleure connaissance des tenants et aboutissants au Proche-Orient et des organisations et pays impliqués, le terrorisme étant dans l’ensemble le fait de groupes structurés, aidés et utilisés par des Etats avec une sorte de sanctuaire au-delà du rideau de fer.

Pour parvenir à assurer nos missions, nous avons développé des liaisons avec la majorité des pays arabes. Les résultats ont été concluants. Nous avons pu éviter des attaques en saisissant notamment de nombreuses caches d’armes

 

Pour autant, jamais nous n’avons pas omis les difficultés rencontrées. Dans l’ensemble, les autorités nous ont fait confiance pendant toute la période. Mais à deux reprises, elles se sont montrées impatientes, en quête de résultats rapides, en créant la bien connue Cellule de l’Élysée en 1982 et une petite équipe autour du ministre de l’Intérieur en 1986 qui, bien entendu, n’ont servi qu’à compliquer les choses.

 

La double compétence « Renseignement et judiciaire » de la DST a souvent été critiquée, notamment par la Police judiciaire. Mais elle a fait et continue à faire ses preuves et est toujours enviée à l’étranger. Nos autorités ne s’y sont pas trompées.

Lorsque le terrorisme est devenu djihadiste, au début des années quatre-vingt-dix, avec la guerre civile en Algérie, les répercussions en France étaient inéluctables comme l’ont montré le détournement d’un avion d’Air France à Alger en 1994 et la série d’attentats aveugles sur notre sol en 1995. Ce terrorisme met désormais en cause des jeunes nés et/ou vivant en France.

Durant toute la décennie et après 2000 un nombre croissant de ces jeunes est allé combattre ou s’entraîner sur les terres ciblées par le jihad : Bosnie d’abord, Afghanistan, Irak, Syrie, Tchétchénie..

Nous avons fait un travail systématique visant à identifier ces individus et à les mettre hors d’état de nuire. La justice spécialisée avec laquelle nous avons depuis le début entretenu des relations confiantes nous a toujours suivis.

Pendant toute cette période, nous avons empêché de nombreux attentats en arrêtant un grand nombre d’individus. Aucune attaque n’a été commise sur notre sol entre 1996 et 2012 (affaire Merah).

 

Par contre, vu le profil des acteurs djihadistes, il y avait dès lors une probabilité de de concurrence avec les Renseignements Généraux dont le rôle était de surveiller les communautés à risque. C’est la raison principale pour laquelle la réforme de 2008 est engagée. Elle a conduit au regroupement de la DST avec une partie des RG dans une nouveau service : la DCRI. Celle-ci deviendra en 2014 la DGSI ; mais cela est une autre histoire.

Sans prétention excessive, nous estimons avoir fait face et laissé à nos successeurs un dispositif et des méthodes qu’ils garderont et développeront encore. Le volume de la menace et des individus impliqués depuis le début des années 2010 est en effet à une toute autre échelle.

Jean-François Clair (*), Inspecteur Général honoraire de la Police Nationale, a passé la grande majorité de sa carrière (35 ans) à la DST, où il a été à la tête de la branche antiterroriste de 1983 à 1997 avant d’en être le Directeur Adjoint. Titulaire d’un DESS de droit public, auditeur de l’IHEDN, il a ensegné à Sciences Po dans le Master de Relations Internationales et donné des cours à l’IRIS (Institut de Recherches Internationales et Stratégiques). Il est, depuis sa création ,Conseiller «Sécurité, Terrorisme» d’ESPRITSURCOUF

Il est coauteur avec deux collègues, Raymond Nart et Michel Guerin, du livre La DST sur le Front de la guerre froide, paru aux éditions Mareuil l’an dernier. Il vient de donc publier ave Louis Caprioli et Michel Guerin  La DST sur le front de la guerre contre le terrorisme aux éditions Mareuil.

FICHE D’IDENTITE DU LIVRE

Titre : « La DST sur le front de la guerre contre le terrorisme »
Co-auteurs : Michel Guérin, Jean-François Clair, Louis Caprioli
Date de la publication : 13/06/2024
Editeur : Mareuil Editions
Format : 14,20 x 21,70 x 2,20 cm
Pages : 210
Prix : 21€
EAN : 9782372543583
ISBN : 237254358X
SKU :
5506290
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