L’origine
des cadeaux de Noël
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Laure Fanjeau (*)
Responsable recherche / développement
et communication digitale
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J+2, les cadeaux ont été distribués dans le monde entier au plus grand bonheur des « petits enfants sages » par le Père Noël sous le regard inquisiteur du Grinch … mais connaissez-vous la véritable histoire des cadeaux de Noël ? Depuis combien de siècles existe cette tradition ? A qui offrions-nous des cadeaux autrefois ? Quelle était la valeur de ces cadeaux autrefois et aujourd’hui ?
Avant d’entamer notre pèlerinage dans le monde festif du cadeau de Noël, arrêtons-nous sur les notions clés : cadeau, don et offrande …
Nous parlons du mot « cadeau » mais connaissez-vous son origine ? Il existe plusieurs origines mais arrêtons-nous sur la version française. Il aurait pour origine le mot « capdel » issu de l’ancien occitan signifiant « capital » ou encore « capitaine ». La signification a évolué au fil du temps de « lettre capitale ornée » à celle de « chose inutile », puis de « fête » et enfin de « présent » que nous connaissons aujourd’hui. Certaines personnes remontent même aux origines latines du mot pour montrer le côté futile du cadeau. Le mot cadeau viendrait du mot latin « catellus » signifiant « petite chaîne ». Gilles Ménage, au XVIIème siècle, montre, dans sa définition de « faire un cadeau », le côté futile des cadeaux : « faire des choses spécieuses mais inutiles » pouvant être comparée aux traits de main des maîtres d’écriture : les chaînes, calligraphies, qui embellissaient les textes. Selon l’Académie française, le terme remonterait au XVème siècle et serait issu du mot « capdel », vieux mot provençal, qui signifie « personnage placé en tête, capitaine » ou du latin « capitellus » qui veut dire « petite tête ».
A l’époque Antique, nous ne parlions pas encore de « cadeau » mais de « don » qui consistait à donner sans contrepartie, de manière désintéressée et intemporelle. Que signifie le mot « don » ? Issu du latin « donum », il désigne un « cadeau », une « offrande ». Le mot « offrande » a une connotation religieuse. Issu du mot latin « offerenda », ce mot signifie « qui doit être offert, présenté » sous-entendu à une divinité ou aux prêtres et ministres qui la représentent (à l’époque et encore aujourd’hui).
L’origine des cadeaux de Noël
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Selon les régions, les pays, les croyances et les époques, le contenu des offrandes (et non cadeaux au départ) et la période des échanges varient …
Durant la période antique en Grèce et à Rome
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Les Romains célébraient leur dieu Saturne lors de la semaine de l’hiver (17 au 25 décembre). Ces fêtes appelées « Saturnales » étaient l’occasion de s’échanger des présents, d’organiser des banquets, d’accrocher du gui ou du houx dans les maisons afin d’être protégé du mauvais sort et d’avoir de bonnes récoltes durant l’année à venir. Cette période festive commençait le 17 décembre, les individus s’échangeaient généralement à ce moment-là les offrandes. Les festivités se terminaient, généralement, le 25 décembre après le solstice d’hiver (21 décembre), lorsque les jours commençaient enfin à se rallonger.
D’autres écrits mentionnent que c’est lors du 1er janvier, journée dédiée par les Romains à la déesse Strénia (dont serait étymologiquement né le mot « étrennes »), que les offrandes au sein des familles se faisaient.
Il existerait une légende selon laquelle lors de la création de Rome en 758 avant J.C., le co-roi Titus Tatius reçut de la part de Romulus un objet en bois précieux en l’honneur de la déesse Strénia. Touché par ce don, le co-roi Titus Tatius aurait décidé d’instaurer cette tradition du don.
C’est en 330 après J.C. que la date de la naissance du Christ a été fixée au 24 décembre du calendrier romain.
Du Moyen-Age à la Révolution
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Au début du Moyen-Age, on offrait des aumônes aux pauvres lors de Noël. Durant cette même période, la population aisée ne s’offrait pas encore de cadeaux mais des présents ou des étrennes. Les riches propriétaires terriens s’offraient des vêtements fins ainsi que des bijoux le 25 décembre ainsi que le 1er janvier. Les offrandes faîtes à l’occasion du premier jour de la nouvelle année prenaient le nom de « premiers dons » et étaient considérés comme un bon présage pour l’année à venir. Les enfants ne recevaient pas encore de cadeaux.
A la Renaissance, les enfants commencèrent à occuper une place nettement plus importante dans la société et au sein des familles notamment lors des fêtes de Saint Nicolas (06 décembre) et des Saints Innocents (28 décembre). Ces jours leur étaient dédiés, mais il faudra encore attendre pour que la notion de cadeaux de Noël pour les enfants se démocratise.
La tradition de Saint Nicolas apparait dès la première moitié du XVIème siècle et les premiers cadeaux à cette même période. Selon la tradition, Saint Nicolas déposait durant la nuit du 5 au 6 décembre des cadeaux alimentaires dans les maisons visitées.
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Du XIXème siècle à aujourd’hui
Il faudra attendre le XIXème siècle et l’essor de la consommation pour voir peu à peu se démocratiser le cadeau de Noël et faire de l’enfant le véritable ambassadeur des fêtes de Noël dans toutes les couches sociales.
L’évolution des cadeaux de Noël
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La nature des premières offrandes
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A l’époque romaine, le 1er janvier les Romains s’offraient des petites douceurs comme du miel, des figues ou encore des dattes mais également des statuettes des dieux à placer sur l’autel de leur maison dédiée aux dieux protecteurs du foyer, de la famille. Les enfants romains recevaient des noix ancêtres des billes de notre enfance.
Selon la religion catholique, l’échange des présents rappelait l’arrivée des Rois mages avec des cadeaux destinés à l’Enfant Jésus : de l’or symbolisant la reconnaissance royale de Jésus ou encore la sagesse, l’encens pour sa divinité ou la puissance de la prière, la myrrhe pour la croix ou la mortification de la chair.
Les premiers jouets en bois pour les enfants royaux apparurent durant la période du Moyen-Age.
Au XVIème siècle, Saint Nicolas déposait durant la nuit du 5 au 6 décembre des cadeaux alimentaires comme des noix, noisettes, pommes ou encore des petits personnages en pain d’épice pour les enfants bien sages.
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Selon la classe sociale …
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En France, la coutume des cadeaux pour les enfants apparait courant XVIème siècle. En effet, les premières traces écrites mentionnant les offrandes et cadeaux aux enfants remonteraient à 1556 (comptes royaux de Marie de Médicis).
Au départ, seuls les enfants issus des classes sociales dîtes « aisées » comme les familles royales ou encore de la petite bourgeoisie recevaient des cadeaux avec lesquels ils pouvaient jouer.
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Toutefois, Paris voit éclore, à la même époque, durant cette période festive, une coutume créant un lien fort entre les étrennes et le don des cadeaux. Des « baraques » sont installées sur les trottoirs parisiens offrant aux enfants des petits jouets ainsi que des sucreries. Le marché du jouet vient de naître.
Une différence subsiste encore jusque dans les années 50 entre les classes sociales. Nous avons souvent entendu nos parents et grands-parents dire « de mon temps, on ne recevait qu’une orange dans nos petits souliers le matin de Noël ». Il était en effet de coutume depuis le XIXème siècle jusque dans les années 50, d’offrir une orange dans les milieux populaires. Selon la région, les enfants pouvaient recevoir une pomme lorsque l’année écoulée avait été moins fructueuse sur le plan économique. Mais d’où vient cette idée d’offrir une orange ? Sous le règne de Louis XIV jusque dans les années 50, ce fruit était désigné comme un produit de luxe cher.
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De l’apparition des premiers jouets comme cadeaux pour les enfants à la démocratisation du modèle bourgeois.
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Les premières traces de jouets pour enfant remonteraient à la Grèce Antique à l’occasion de deux fêtes qui avaient lieu en fin d’année : les Anthestéries (fête de Dinysos) et les Diasies (fête de Zeus). Au Vème siècle avant Jésus Christ, les enfants athéniens recevaient des jouets de commerce selon Aristophane dans sa pièce « Les Nuées » (423 avant J.C.). Les enfants romains, durant la Rome antique, recevaient des noix ancêtres des billes.
A partir du XIVème siècle, les merciers commencent à vendre des jouets bon marché pour les enfants.
Il faudra attendre le XVème siècle avec l’humanisation de la Sainte famille, dans le monde catholique, pour que les enfants reçoivent des cadeaux, la frivolité des jouets étant mal perçue avant. Ce n’est vraiment qu’à l’époque de la Renaissance que les enfants seront mis en avant lors des fêtes de fin d’année comme celle de Saint Nicolas, le 06 décembre, ou encore celle des Innocents le 28 décembre.
Dès le XVIème siècle, selon les écrits du pasteur Joseph Conrad Danhauer, les enfants commencèrent à demander des cadeaux qu’ils pourraient utiliser pour jouer comme des poupées en bois et chiffon qui, étant chères, étaient réservées aux filles nobles et princesses royales. Des traces écrites permettent également de remonter à la même époque des scènes de fêtes familiales représentant Saint Nicolas apporter des cadeaux et friandises aux enfants sages.
Le XVIIIème siècle sera un siècle porteur pour le monde du jouet. En 1760, les meilleures boutiques de jouets parisiennes font l’objet d’affiches publicitaires placardées dans la capitale. Les clients de ces boutiques sont issus de la royauté et des notables de la capitale.
Le marché du jouet connait, durant ce siècle, une hausse conséquente de son activité. La production ira jusqu’à atteindre des millions d’objets par an entre 1770 et 1780.
La révolution commerciale des Grands Magasins permet à l’industrie du jouet de se développer et de croitre. Des rayons spécialisés dédiés aux jouets verront le jour dans ces magasins à partir des années 1880 avant de se développer dans d’autres commerces. Les étrennes deviennent, au même moment, une fête commerciale. Les enfants deviennent la cible des créateurs et fabricants de jouets ainsi que des Grand Magasins qui iront jusqu’à mettre, lors de cette période, en scène, Noël, dans ses vitrines afin d’attirer le regard de ces petits consommateurs.
Le don de jouets aux enfants est dorénavant synonyme de « Noël moderne ».
Entre légendes et croyances
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La « petite histoire » des chaussettes de Noël
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La tradition de la chaussette que nous laissons le soir de Noël accrochée à la cheminée remonterait à l’époque de Saint Nicolas selon une des nombreuses légendes entourant ce saint. Saint Nicolas, prévenu que trois sœurs trop pauvres ne pouvaient pas se marier faute d’être dotée, aurait jeté des pièces d’or dans les bas de ces dernières suspendus près de la cheminée pour sécher …
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D’une région à l’autre, des variantes dans la période de distribution des cadeaux et le nom des « donateurs »
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Au XVIème siècle, des donateurs « sacrés » offrant des cadeaux aux enfants apparaissent hors du cocon familial. Les parents peuvent donner de l’argent à leurs enfants quand leur bourse le leur permet.
Au XIXème siècle, on voit apparaitre de nouveaux donateurs autres que « sacrés » et familiaux.
- Dans le Nord de l’Italie, c’est la Père Noël qui apporterait les cadeaux le 24 décembre alors que dans les autres régions il s’agirait de Sainte Lucie le 15 décembre ou Befana le 06 janvier. Gentille sorcière, selon la légende, Befana aurait indiqué aux mages le chemin de Bethléem. Ces derniers lui auraient proposé de les accompagner mais elle aurait refusé. Prise de remords, elle aurait pris son panier rempli de gâteaux pour l’Enfant Jésus mais n’aurait jamais réussi à les retrouver. Elle aurait donné les gâteaux aux enfants croisés sur son chemin. Elle apporterait, aujourd’hui, sur son balai magique cadeaux et friandises aux enfants sages et du charbon aux enfants pas sages.
- En Espagne et en Sardaigne, le rôle reviendrait aux mages, le jour de l’Epiphanie (06 janvier).
- En France, le Père Janvier, le Bonhomme Noël ou encore le Père Noël réaliserait ce travail. Dans les familles catholiques, la tradition voulant que ce soit l’Enfant Jésus qui apporte les cadeaux aux enfants perdura juqu’au XXème siècle.
- En Allemagne, Werhnachtsmann serait en charge de distribuer les cadeaux aux enfants.
- En Angleterre, Father Christmas et Santa Claus aux Etats-Unis seraient les personnages à qui incomberait ce travail.
Ainsi à travers les siècles, le moment convivial et religieux des fêtes de fin d’année est devenu plus populaire laissant une pace plus importante aux enfants et au marché du jouet sous le regard toujours bienveillant de Saint Nicolas, du Père Noël ou encore de Befana …
(*) Laure Fanjeau, Responsable recherche / développement et communication digitale. Auditrice « Jeunes de l’IHEDN » et de l’INHESJ, elle est officier de la réserve citoyenne de l’armée de l’Air et de l’Espace. Spécialisée en communication, marketing et publicité, elle a mené des projets civilo-militaires nationaux et européens. Elle a fondé l’agence FANJEAU LAURE (spécialisée en communication et relations publiques) au service quotidien d’associations militaires et civilo-militaires et de l’Esprit de défense. |
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