ALGÉRIE :
RAPPORT D’ÉTONNEMENT
Par Pierre JOUCLA,
André et Réjane GALY,
Michèle NAVAS,
Membres de l’association espritcors@ire
Par un groupe d’amis « pieds noirs » ( professions libérales, responsables d’entreprises… ) qui sont retournés en Algérie en mai dernier. Pour certains c’était la première fois depuis 1962, pour d’autres c’était il y a une dizaine d’années. Ils sont allés de l’Algérois à l’Oranie en passant par la bande côtière, Tipasa, Orléansville, Mostaganem, puis Tlemcen, Sidi Bel Abbès, Ain-Temouchent…
Nous avons bien sur trouvé le pays magnifique et potentiellement riche d ‘un bel avenir.
Toutefois nous en revenons avec des sentiments contrastés et partagés :
DES POINTS POSITIFS :
- La joie des retrouvailles, pour nous pieds noirs, du pays de notre adolescence !
- Un accueil chaleureux voir même nostalgique de « pieds noirs » qui reviennent voir le pays : L’attitude des algériens côtoyés dans les rues, lors de nos ballades nous a étonné par leur accueil chaleureux et le nombre de « bienvenue » claironné à notre égard. Contrairement aux positions des différents gouvernements algériens depuis l’indépendance qui ont toujours agressé diplomatiquement la France et au sentiment très répandu dans l’opinion française d’une culpabilité post-coloniale, la population algérienne conserve une certaine sympathie pour ne pas dire empathie pour les français. Le sentiment d’une relation entre nos peuples, plus particulièrement pieds noirs /algériens, qui n’est pas dégradée, ou qui retrouve une réalité positive après que les passions, dues à la guerre d’indépendance, se soient atténuées au cours des années.
- L’étonnement positif par rapport au développement des infrastructures : réseau autoroutier, voies ferrées, universités, aéroports, rénovation des quartiers, installation d’usines, disparition des bidonvilles…
- Quelques belles réalisations architecturales modernes ou en réhabilitation : Monuments, bâtiments administratifs, immeubles, mosquées (la plus grande mosquée du monde réalisée par Bouteflika).
- De nouveaux quartiers dans les villes avec de belles avenues qui sont plus fréquentés que les centres historiques que nous avions connus, qui lui est un peu délaissé (immeubles délabrés, mal entretenus, rues ou trottoirs non réparés, mais à Alger ou à Oran, depuis quelques mois, de beaux immeubles d’habitation des années trente sont en cours de restauration).
- La construction impressionnante d’immeubles d’habitation, y compris en rase campagne sous forme de villes champignons au milieu de nulle part.
- Dans la campagne l’agriculture qui redémarre depuis quelques années et bien sûr dans le Témouchentois pays de vigne par excellence, celle-ci a pratiquement disparu et est remplacée par des céréales. La récolte était prometteuse grâce à une bonne pluviométrie printanière. Bonne pioche pour l’Algérie car celle-ci est devenu le 1er importateur mondial de blé, démographie et forte hausse sur le marché mondial des céréales obligent.
- Une manifestation religieuse œcuménique à Santa Cruz inattendue mais avec beaucoup de monde
- Une présence significative de la langue française, sur les documents officiels comme sur les panneaux indicateurs ou publicitaires plutôt en français qu’en arabe dans les centres villes.
DES INQUIÉTUDES ET DES QUESTIONS :
- Une démographie galopante avec une jeunesse aculturée : peu de nouveaux lycées et quelques universités.
- Une très forte population jeune et inactive qui peuple les rues des grandes villes et donne une idée du niveau de chômage qui à court terme représente pour ce pays un problème insoluble à gérer compte tenu d’une gouvernance qui n’a rien fait pour prendre en compte l’explosion démographique et l’avenir de cette jeunesse.
- Deux populations qui se côtoient dans les villes : Celle habillée à l’européenne des classes moyenne et supérieure et celle des quartiers populaires avec des femmes voilées et portant l’abaya noire alors qu’il y a 50 ans elle portait le haïk blanc…
- Un urbanisme anarchique avec un entretien insuffisant dans certains quartiers des villes, dû à l’exode rurale de survie et de sécurité des années 90.
- La non exploitation du capital touristique du pays et le peu d’intérêt porté aux rares infrastructures existantes (offre, organisation, entretien). Nous avons été très déçus par l’anarchie immobilière, la dégradation et la saleté des plages que nous avions connues.
- Une économie mal définie avec une inflation massive et la présence de 70 000 chinois (la première communauté étrangère)
- Une tolérance affichée-trop affichée, nous semble-t-il par rapport à toutes les expressions de l’Islam et des religions en général.
- L’influence de la Turquie qui rénove les mosquées et apporte un mécénat culturel très apprécié de la population.
- Un régime politique à bout de souffle dont personne ne parait savoir ce qu’il va devenir.
Notre voyage se terminant nous avons été heureux de retrouver le pays de notre jeunesse et malheureux d’être devenu dans ce pays des étrangers…
Voilà ! mais ce voyage restera inoubliable.
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