LE MONDE VU PAR XI JINPING
ÉLAN GLOBAL NORMATIF ET CONTREFEUX

 François Danjou (*)
Sinologue

 

Un nouveau dossier thématique :

XI JINPING : LA CHINE
À LA CONQUÊTE DU MONDE

 

Nous créons un nouveau dossier thématique, réalisé avec les articles déjà publiés dans ESPRITSURCOUF.fr ;

Nous avons classé les articles en 4 rubriques :

  • Les nouvelles routes de la soie,
  • Chine et Relations internationales
  • FONCTIONNEMENT INTERNE : Des problèmes,
  • RAPPORTS d’ETONNEMENT de lecteurs d’ESPRITSURCOUF.fr

Et nous présentons ci-dessous un article de synthèse

 

La photo illustrait un article du China Daily quand Xi Jinping avait été placé au cœur du Parti Communiste par le plenum du Comité Central de décembre 2016. Le commentaire, voulant préserver les apparences du maintien d’un système de décision collégial, réfutait les analyses occidentales le désignant comme un « homme fort ». 15 mois plus tard, lors de la réunion de l’ANP de mars 2018, il faisait éliminer la limitation à deux mandats du président de la République.

La force des contrefeux allumés à l’étranger – essentiellement en Occident, mais pas seulement – contre les stratégies extérieures de Pékin incitent à revenir sur la manière dont le Parti communiste chinois voit lui-même la place et le rôle de la Chine dans le monde.

L’analyse qui suit rappelle les éléments clés des « caractéristiques chinoises » énoncées par Xi Jinping au 19e Congrès au moment où lui-même affirmait son contrôle sans partage sur l’appareil.

Après quoi, s’appuyant sur un texte de l’ancien premier ministre australien Kevin Rudd paru dans Foreign Policy en mai 2018, « How Xi Jinping Views the World. The Core Interests That Shape China’s Behavior », elle propose l’hypothèse d’une vision stratégique chinoise par cercles concentriques dont le cœur est le Parti, confondu avec l’État, clé de l’unité et de la stabilité du pays.

Étendant progressivement son action et son influence normatives à ses approches immédiates par le levier de sa puissance économique, l’intention de Xi Jinping serait, selon Rudd, par un élan centrifuge du plus près au plus loin, de « réformer progressivement le système international de l’après-guerre basé sur le droit pour mieux le conformer aux intérêts de la Chine. »

Directement liée à l’efficacité des contrefeux, la question, ajoute Rudd, « est de savoir si Xi Jinping réussira à mettre en œuvre tout ou partie de sa “grande stratégie“. » 

Rappelons d’abord qu’à l’énoncé de cette vision par le n°1 chinois, le 19 octobre 2017, le système vertical de la politique chinoise a dissuadé et effacé toute critique potentielle des voix contraires. Celles-ci existaient forcément au sein de la mouvance intellectuelle chinoise, mais n’eurent pas le loisir de s’exprimer. Seules furent autorisées les expressions laudatives venant du cœur de l’appareil ou des commentateurs acquis aux stratégies du centre.

Ainsi Zhang Dejiang à l’époque président de l’Assemblé Nationale qui lui aussi plaçait le Parti au cœur : « Une contribution historique au développement du Parti » ; Yu Zhengsheng ancien n°4 : « Une adaptation importante du marxisme aux caractéristiques chinoises » ; Liu Yunshan, maître de la propagande : « Une immense signification pratique et théorique, que tous les membres du parti devraient étudier soigneusement ».

A côté de ces trois figures du Comité Permanent de l’ancienne garde rapprochée, des professeurs d’université ajoutèrent également leur appréciation positive : Chen Shuguang, membre du Comité Central, professeur à l’École du Parti : « A l’orée de l’ère qui s’annonce, le Parti doit écrire un nouveau chapitre du marxisme auXXIième siècle pour atteindre les buts définis par le Congrès » ; You Yezhong, vice-président de l’Université de Wuhan : « la nouvelle pensée tourne une page et jette un éclat nouveau sur le socialisme aux caractéristiques chinoises. »

UNE ENTREPRISE GLOBALE AUX « CARACTÉRISTIQUES CHINOISES ».

La carte montre l’épine dorsale originelle des « nouvelles routes de la soie » avec en marron les membres de la Banque pour les investissements d’infrastructure, en noir les 6 corridors, d’est en ouest, 1) vers la Russie par la Mongolie, 2) vers l’Europe de l’Est par l’Asie Centrale, 3) vers le Pakistan, 4) vers la Turquie par l’Iran, 5) et 6) vers l’Asie du Sud-est. En bleu la route maritime qui touche l’Asie du Sud-est, Afrique, le Moyen Orient et l’Europe du sud par le port du Pirée et l’Adriatique. Pékin a également défini une route de la soie en Amérique latine et dans l’Arctique.

 

Se projetant jusqu’en 2049, année du 100e anniversaire de l’avènement du Parti, échéance dont la durée est improbable pour n’importe quelle démocratie, Xi Jinping voyait loin. Après avoir défini l’étape intermédiaire d’une première phase (2020 – 2035) dont l’objectif est de moderniser le pays, il a fixé le but pour les 15 années suivantes : « construire un grand pays socialiste moderne et radieux, harmonieux, culturellement avancé, démocratique, fort et prospère»

En même temps, il a sans ambiguïté signalé son intention de créer un climat international favorable aux stricts intérêts du pays : « Nous nous sommes beaucoup efforcés de mettre en œuvre une diplomatie puissante aux caractéristiques chinoises, avançant notre agenda international de manière globale et multiforme, afin de créer un environnement extérieur favorable au développement de la Chine. »

A 16 mois de distance, découvrant l’ubiquité et la force multidimensionnelle des stratégies chinoises, nombre de pays observent aujourd’hui les actions de Pékin avec un sentiment d’inquiétude. Dernière cible en date de la pensée normative chinoise appliquée à modeler le monde à sa main ou à riposter à ce que Pékin perçoit comme une injustice : la Nouvelle Zélande.

Selon le New Zealand Herald, cité par Supchina, Wellington a « rejoint le club des pays (Turquie, Canada, Norvège, Australie, Pologne, Tchécoslovaquie, Lituanie) devenus la cible de la colère de Pékin ». Réagissant aux méfiances énoncées par le gouvernement mettant en doute la fiabilité de Huawei, le gouvernement chinois a différé la visite prévue en début d’année à Pékin de la première ministre Jacinda Arden (Socialiste démocrate progressiste, 39 ans).

Récemment un vol d’Air New Zealand en route pour Shanghai fut contraint de faire demi-tour au prétexte que les documents du vol faisaient référence à Taïwan comme s’il s’agissait d’un pays indépendant. En même temps, s’installe en Nouvelle Zélande la phobie que tous les résidents Néo-Zélandais en Chine pourraient être la cible d’arrestations arbitraires, comme ce fut récemment le cas pour les Canadiens en riposte à l’arrestation à Vancouver de la fille de Ren Zhengfei, le PDG de Huawei.

Examinant les stratégies de la Chine de Xi Jinping, Kevin Rudd identifie 7 cercles concentriques, répartis en 3 catégories partant du centre : 1) Le Parti, l’Unité du pays, l’économie ; 2) Les voisins directs et les espaces maritimes du Pacifique Occidental ; 3) Les relations avec les pays en développement et avec l’ordre mondial datant de l’après-guerre.

Ajoutons que l’extraordinaire développement de l’économie, résultat de la puissance du nombre combinée à un infatigable esprit d’entreprise encadré par une vaste et omniprésente bureaucratie héritière de l’organisation impériale des Han, crée un facteur multiplicateur enveloppé dans une culture qui, dans bien des cas, percute de plein fouet l’organisation du monde telle qu’elle avait été définie par les États-Unis et leurs alliés occidentaux après 1945.

 


 

(*) François Danjou

 

Sinologue diplômé de chinois de l’INALCO (Institut national des langues et civilisations orientales). Il a vécu 15 ans en Asie. Il s’est spécialisé dans l’analyse des relations de la République populaire de Chine avec le Tibet et Taïwan. Il est l’auteur d’articles publiés sur le site « questionchine.net »

 

Article publié in extenso sur https://www.questionchine.net/

GEOPOLASIE, association loi 1901 (à but non lucratif) a été créée pour développer dans le public francophone une meilleure compréhension de l’évolution de la Chine en présentant, sur un site Internet en français, l’information ouverte, évaluée et synthétisée dans son contexte économique, culturel ou historique. 
En avril 2002 naissait le site Question Chine, sous la forme d’une lettre mensuelle d’une quinzaine de pages. Sous l’impulsion d’Henri Eyraud, observateur confirmé des questions chinoises, et d’Ivan Lewkowitz, webmaster, Question Chine est devenu aujourd’hui un site d’information « intelligente » sur l’actualité chinoise (Chine, Taiwan, asie). Prenant une importance croissante dans le contexte de l’Asie et du monde, celle-ci est ainsi mise à disposition des lecteurs francophones. 
L’information est sélectionnée pour sa crédibilité et sa signification, évaluée, présentée et analysée dans des articles classés dans une dizaine de rubriques pertinentes. Le lecteur a une vision en continu des principaux aspects de l’évolution en Chine : économie, relations extérieures, politique intérieure, problèmes de société, volet Technologies et énergie, mais aussi Taiwan, une rubrique « Chronique », « Lectures et opinions » et enfin « Album », dans une volonté d’ouverture vers une actualité culturelle. 

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