Suis-je un idiot intolérant
mais heureux ?

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Christian Fremaux (*)
Avocat honoraire

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Avec une liberté de ton qui lui est propre, Christian Frémaux se saisit des cas de perception équivoque de la notion de police – polymorphe – dans une conjoncture où l’on n’est plus à une contradiction près. Les propos n’engagent ici que l’auteur

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Soyons partial un peu cela détend dans cette actualité dramatique.

Quand j’entends le mot police je m’attends à tout. Oh pas à propos des forces de l’ordre que je soutiens sauf s’il y a des fautes avérées par la justice car nul n’est parfait dans l’exercice de ses fonctions y compris ceux qui jugent. Parfois curieusement en droit mais bien sûr je respecte l’indépendance des magistrats, et surtout ceux qui lors d’une manifestation avec l’irruption des black- blocs soutiennent les pacifistes qui portent un panneau avec l’inscription « un flic, une balle » et concluent que c’est une balle de golf ou de tennis ! C’est la police du sport. Ou les militants qui ne bronchent que mus par l’émotion ou l’idéologie. Ou sont secoués par des prétendues victimes et leurs comités de soutien et par des élus qui ne devraient parler qu’en présence de leurs avocats. Je sélectionne les émetteurs, c’est cela la neutralité.

Le terme police m’enchante surtout si c’est M. Mélenchon qui l’emploie lui qui incarne la République à travers ses hologrammes et selon sa déclaration fracassante lors de la perquisition des locaux de LFI. Il ne peut se tromper sur les mots en raison de sa grande culture certes orientée mais exultante et niant toute autre, lui qui a passé toute sa vie dans le domaine public de parlementaire à ministre, de chef de parti à quasi président de la République de fait selon ses dires. Quel exploit. Toute une carrière sans avoir créé des emplois ou géré des collaborateurs voire s’être confronté au secteur privé, en ayant critiqué les chefs d’entreprise et les riches forcément voleurs, admirateur de figures étrangères qui ont échoué mais dont il imiterait les choix publics, et il continue à donner des leçons et à fixer la bien-pensance. On en reste pantois. Mais s’il a des fans qui votent c’est donc que des citoyens le croient pour envoyer à l’assemblée nationale des député(é)s dont la modération et la tenue font des merveilles dans le vide et l’invective. C’est une police de caractères.  

Mélenchon parle toujours de la police. Il doit l’aimer puisqu’il ne cesse de l’évoquer : « la police tue… » mais le protège au quotidien ainsi que certains de ses soutiens ; je suis contre « la police des vêtements » et il ne critique pas le port du voile ou des abayas sauf en Afghanistan ou en Iran; je ne supporte pas « la police des mots…» mais il a quand même reproché à la présidente de l’Assemblée nationale de confession juive en voyage avec d’autres parlementaires en Israël « de camper à Tel Aviv pour encourager les massacres » à Gaza . Mme Braun-Pivet choquée en a presque pleuré, mais M. Mélenchon a dénoncé la mauvaise interprétation de son « bon » mot accusateur. Je ne l’ai pas entendu déplorer la mort des français tués par le Hamas qui ne serait pas une organisation terroriste mais un mouvement de résistance ? Ou s’offrir tel Sébastien le martyr et patron des policiers le torse en avant lui qui revient du Maroc, en intermédiaire à la place du Qatar vilipendé pour faire libérer les otages français ou non, un otage valant un autre otage et l’humanisme ne se divisant pas. On doit pleurer toutes les victimes ce qui n’est pas un choix politique.

Il est contre la « police de ses pensées » car il ne pense pas ce que les autres ont retenu : il a voulu dire autre chose ! On attend de savoir quoi sur la paix par exemple et ce qu’il propose sur le terrain qui peut être viable dans l’avenir. Et donc dans notre pays où les ressentiments s’affrontent. Que ferait-il s’il était aux affaires pour protéger tous les Français ce qui est le devoir suprême ? Le rôle des politiques est aussi d’apaiser, souder, et unir. Et de ne pas donner de faux espoirs.

La liberté de manifester est fondamentale mais il ne faut pas qu’elle dégénère en favorisant la partition du pays et en créant des troubles d’atmosphère pour le moins. Sur la place de la République à paris j’ai du mal à admettre le cri Allah Akbar comme un doux murmure à l’adresse de dieu. Que je ne fréquente pas d’ailleurs ce qui me semble être mon droit ?  J’ai entendu cet appel dans un sens plus large et relié parfois au moment où un crime a eu lieu. Et je l’ai soupçonné dans la minute de silence refusée par des gamins pour l’assassinat du professeur Bernard. J’ai sûrement tort car je ne suis pas assez tolérant et fin dans l’analyse. En ne distinguant pas les brebis des loups. Et je partage l’avis de M. Mélenchon : pas d’amalgame ! Dans tous les sens, sans exception.

Je considère que la théocratie est incompatible avec la démocratie et la République. Et en France on a décapité Louis XVI représentant dieu sur terre, cela suffit pour les siècles des siècles. On n’a pas à répéter la violence qu’elle soit prétendument légitime ce que je récuse ou pas ce dont je suis certain. On doit d’abord gérer les egos et les pulsions meurtrières des hommes et des femmes : il y a du travail pour l’humanité. Jean-Jacques Rousseau n’a pas gagné car le mal existe l’histoire ancienne et contemporaine le démontre. Les millénaires passés sont peut- être responsables de ce qui ne peut se concilier aujourd’hui. Pour le malheur de ceux qui n’y sont pour rien. On ne paie pas pour nos ancêtres.

Plus personne ne maitrise personne. Chacun a des droits et aucun devoir. Les lois et règles internes sont en option car il y a des minorités qui pensent détenir la vérité. Et veulent l’imposer de force. Sur le plan international c’est la grande illusion : même le conseil de sécurité à l’Onu est bloqué. On se bat entre ethnies, tribus, frères et voisins. Chez nous les fausses alertes sont graves et dénotent un état d’esprit pernicieux. On ne joue pas avec la sécurité. Et si les supposés petits plaisantins étaient sérieux en testant nos capacités de défense ? La nation est en danger. 

Il n’est pas honteux de s’excuser quand on a dérapé verbalement et l’excès ne mène à rien. On ne campe pas sur ses outrances en maugréant et en s’estimant victime de soi-même, éternel incompris. La conquête du pouvoir ne justifie pas tous les moyens et la très mauvaise foi. Outre la haine des autres. La fin ne doit être que le commencement d’une période qui doit être prospère si possible car nous avons des concurrents et une conjoncture aléatoire, avec de la concorde minimum soyons réalistes, et du respect globalement l’utopie est utile. Dans le cadre des institutions que nous avons la chance de posséder et qui ont fait leurs preuves même si on doit les améliorer.  

La liberté d’expression comme la tolérance ne sont pas sans limites. Je suis un idiot qui ne partage pas ce qui conduit aux maux. Et je ne suis pas heureux de voir et entendre ce qui se passe. Bien sûr je ne parlerai plus à qui osera répondre oui à ma question !        

(*) Christian Fremaux, avocat honoraire du barreau de Paris, est diplômé de CEDS (centre d’études diplomatiques et stratégiques), auditeur de l’IHEDN, et président d’honneur de l’association des auditeurs de l’INHESJ (Institut National des Hautes Etudes de Sécurité et de Justice). Il a enseigné jusqu’en 2005 à HEC et dans plusieurs universités parisiennes. Il a été élu à l’Académie des Sciences d’Outre-mer et est actuellement président de séance auprès du Conseil des Prudhommes de Paris. Il a publié de nombreux articles dans la presse régionale, nationale ou spécialisée. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages, dont « les Français victimes de leur administration » aux éditions Michel Lafon.