Une classe politique…
sans classe…
Pascal Le Pautremat (*)
Rédacteur en chef d’Espritsurcouf
À l’heure de l’omniprésence des images, des relais d’informations par les diverses applications du Net, les politiques de communication sont souvent féroces. Et les échanges entre politiques de plus en plus violents, de surcroît à propos de la réforme des retraites.
Or, lorsque l’on revisite les débats politiques des années 1970 aux années 1990, il y avait, certes, des postures incisives, mais l’on restait poli, avec le sens de l’éloquence. Prenons par exemple les débats qui se sont déroulés à propos du traité de Maastricht, l’échange notamment entre François Mitterrand, qui voulait ce traité, et Philippe Séguin, partisan de la préservation de la souveraineté nationale. Il témoignait d’une certaine courtoisie, d’un respect mutuel en dépit de positions tranchées, d’un sens de la formulation et d’une parfaite maîtrise de l’art oratoire.
Aujourd’hui, qui peut nier que de nombreux députés, lors des séances à l’Assemblée nationale, ou des « personnalités » politiques, lors de pseudos débats télévisés, donnent une image indigne de leurs mandats de représentants du Peuple ? Entre invectives, capharnaüm inaudible… ils défendent de manière assez affligeante les intérêts de leurs mandants, s’inscrivant dans le déni et une obstruction continuelle.
Est-ce que les capacités à présenter une réflexion complexe, la maitrise du vocabulaire, celle des tournures pertinentes, ont à ce point disparu pour que nous en soyons réduits à subir de telles atrophies ?
Alors que l’État ne cesse de ramener les questions de défense et de sécurité aux capacités de résilience des citoyens, rappelons surtout que la sidération de ces derniers face à la vacuité politique va peut-être donner jour à une réaction collective, que l’on perçoit déjà chez nombre de jeunes étudiants : la volonté de s’impliquer en politique et de redonner à la gestion de la cité toutes ses lettres de noblesse. Car, soyons francs, les gouvernements et présidents de ces dernières années ne resteront pas dans le Panthéon de l’Histoire, loin d’être retenus comme figures emblématiques d’un renouveau politique et de la valorisation de la Nation.
Il suffit, pour cela, de prendre la guerre russo-ukrainienne comme socle d’analyse pour recueillir des déclarations plus affligeantes les unes que les autres. Pas de sens de la retenue, de la mesure pour favoriser la désescalade et le retour à une diplomatie active, favorable à un retour de la paix et à un statu quo territorial… Au lieu de cela, la réactivation d’une nucléarisation hors contrôle semble s’accélérer au regard de la position tranchée de Vladimir Poutine.
Aussi, en raison du contexte très préoccupant, nous consacrons ce numéro 208 d’Espritsurcouf à la guerre en Ukraine.
Alors que les « va-t’en guerre de salon » sont en train de jouer avec le feu et la destinée de générations d’êtres humains, Jean-Pierre Ferey, sur fond de misère logistique systémique, rappelle quelques vérités quant à la stratégie de dissuasion nucléaire (rubrique défense).
En corrélation avec la guerre russo-ukrainienne, dont la tournure devient de plus en plus préoccupante, Pierre Charrin nous rapporte les grandes lignes que pouvaient tenir des analystes américains, à l’instar de Georges Kennan, sur l’impossibilité de la Russie d’accepter l’indépendance de l’Ukraine, tout comme l’extension de l’OTAN à ses frontières… Les faits actuels viennent confirmer la pensée de Kennan 🙁rubrique Histoire).
Ce même conflit inspire Michel Goya qui met en avant diverses hypothèses quant à la suite des évènements (rubrique Géopolitique). Philippe Goujon, pour sa part, fait le point sur l’aide humanitaire apportée aux Ukrainiens : thème crucial dont, paradoxalement, on ne parle quasiment plus aujourd’hui (rubrique Humeurs)
Dans la rubrique Livres, Julie d’Andurain est à l’honneur pour son œuvre magistrale dédiée au général Gouraud. Elle offre ainsi une biographie unique de cet officier majeur de l’époque coloniale, de la fin du XIXe siècle au premier tiers du XXe siècle, au terme de plusieurs décennies de travail de recherche et d’analyse : Le général Gouraud. Un destin hors du commun, de l’Afrique au Levant.
La revue d’actualité d’André Dulou vous apportera, comme d’habitude, une sélection d’articles portant sur les thèmes majeurs d’une actualité particulièrement dense : « Sur un an de guerre en Ukraine implication militaires, économiques et géopolitiques »
Dans la rubrique Vidéos, le ministère des armées présente l’exercice ORION au cours duquel les armées françaises avec leurs alliés se prépareront à une guerre de haute intensité
Le SEMAPHORE n°36 de vendredi prochain analysera un an de conflits russo-ukrainiens sous ses différentes facettes, militaires mais aussi économiques, humanitaires, cybersécurité ou géopolitique …
Bonne lecture.
(*) Pascal Le Pautremat est Docteur en Histoire Contemporaine, diplômé en Défense et Relations internationales. Conférencier et chargé de cours dans l’Enseignement Supérieur, il a enseigné à l’Ecole Spéciale militaire de Saint-Cyr et au collège interarmées de Défense. Auditeur de l’IHEDN (Institut des Hautes Études de Défense nationale), ancien membre du comité de rédaction de la revue Défense, il est le rédacteur en chef d’ESPRITSURCOUF. Son dernier ouvrage « Géopolitique de l’eau : L’or Bleu » est présenté dans le numéro 152 d’ESPRITSURCOUF du 30 novembre 2020 |
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