Entre JO
et jeu de guerres

Pascal Le Pautremat (*)
Rédacteur en chef d’Espritsurcouf

En marge d’une rentrée souffreteuse, l’Elysée, par le jeu d’une communication à tout crin, a tout fait pour retenir l’allégresse qu’ont suscitée les Jeux olympiques et paralympiques.

Certes, assurément, il y a bien eu communion entre des spectateurs conquis et des athlètes qui ont brillé par leur pugnacité et leur excellence. Mais, la phase des jeux à peine refermée, la nostalgie a vite été établie, provoquée, histoire peut-être de prolonger encore la cécité sur les problèmes de fond, tant de notre monde que de notre propre pays. Une parenthèse voulue donc enchantée, loin du chaos et des soubresauts de la politique nationale et internationale.

La politique nationale ? Nous en voyons tous les jours les dysfonctionnements, entre absence de cohésion interpartisane – au détriment de la Nation qui balance entre espoir et amertume – et jeux de guerre de clans, de réseaux et surtout d’égos. Au cœur d’une ploutocratie savamment perpétrée dans les cercles parisiens…et européens…

La politique internationale ? Les médias la résument le plus souvent aux affaires étatsuniennes, autour des prochaines élections présidentielles, en faisant mine de croire en un sursaut consciencieux et responsable. L’Europe ? Peu ou pas de mots pour relater les intrigues d’Ursula Van Der Leyen que l’on croyait pourtant hors-jeu, confondue par les divers scandales auxquels elle était associée. L’Allemande conservatrice a tout fait pour constituer une nouvelle équipe de commissaires dévoués et non critiques à son égard. Thierry Lebreton, en démissionnant, n’a pas manqué d’intégrité pour dénoncer ainsi les dérives de la présidence de la commission européenne.

Vraiment, il n’y a que les aveugles du dogme européen pour croire en cette Europe dont la direction échappe à un vrai processus démocratique. À voir, toutefois, si les parlementaires européens vont témoigner de lucidité face à ce marché de dupes, lorsque Ursula Van Der Leyen voudra faire adouber la nouvelle commission.

En parlant de frais… L’Europe accorde à nouveau des dizaines de milliards d’euros à l’Ukraine, entre dons et prêts. Or, toute personne informée a minima sait pertinemment que les Ukrainiens ne seront pas – jamais ? – en mesure de les rembourser… Ces fonds le seront par les citoyens européens et français en particulier… Un poids de plus pour les dettes nationales, déjà abyssales. D’ailleurs, en France,, l’Exécutif plancherait notamment sur une hausse des impôts… qui, de toute manière, interviendra bien tôt ou tard.

Le manège est en roue libre…

 

Pendant ce temps, les guerres se poursuivent avec des pertes humaines considérables…une fois de plus.

Si les médias et les observateurs en Europe s’émeuvent de la mort des migrants clandestins, dans les eaux de la Méditerranée ou de la Manche, aucune voix, par contre, ne s’élève vraiment pour déplorer la nouvelle plongée abyssale du Soudan qui renoue avec les pires années de la décennie 1990 et du début des années 2000.

La guerre du Soudan voit en effet s’affronter, depuis avril 2023, les Forces armées soudanaises (SAF) du général Abdel Fattah al-Burhan, à la tête du pays depuis le putsch de 2021, et les Forces de soutien rapide (RSF) du général Mohammed Hamdan Daglo. Cela a provoqué, en un peu plus d’un an de conflit, 10 millions de réfugiés, plusieurs dizaines de milliers de morts, sans compter près de 30 millions de Soudanais qui souffrent de malnutrition sévère.

Comme pour la guerre russo-ukrainienne, qui prend une ampleur spatiale effarante et joue d’une imbrication multinationale en roue libre, elle aussi, la guerre au Soudan ne bénéficie d’aucune once d’apaisement négocié et raisonné par des interlocuteurs en conscience…

Vraiment formidables, ces années 2020 !

 

Dans ce nouveau numéro (N°242), Espritsurcouf maintient le cap de sa nouvelle formule et vous propose deux articles.

L’espace indopacifique, on le sait, est au cœur des plus vives préoccupations sécuritaires, sous le poids des jeux d’influence des grandes puissances, entre association tactique et rapport de force de nature potentiellement conflictuelle. Le Commandant Jerémy Bachelier, expert reconnu de ladite zone, a bien voulu faire part de son analyse à Athénaïs Jalabert, en insistant notamment sur la posture de la France : « La stratégie indopacifique française » (rubrique Géopolitique).

Dans un tout autre domaine, on constate combien les drones imprègnent largement la vie des citoyens comme les politiques étatiques, entre activités civiles et finalités militaires et sécuritaires. Pierre Bagot dresse ainsi une vue d’ensemble des drones qui sont aujourd’hui au cœur de la réalité internationale : « La généralisation de l’emploi des drones » (rubrique Défense).

En complément de ce thème majeur, Laure Fanjeau a sélectionné pour vous une vidéo consacrée à la lutte contre les drones, qui repose sur une panoplie de moyens technologiques à l’efficacité probante (rubrique Vidéo).

Outre l’Agenda qui souligne le calendrier d’évènements à retenir, André Dulou, vous propose une nouvelle Revue d’actualité, où chacun pourra y trouver divers articles et liens vers des sujets relevant des domaines habituels et riches de la géopolitique aux questions d’information et de renseignement ; des zones de conflits aux forces armées, sans oublier des références à la presse étrangère.

Pour parachever ce nouveau numéro de rentrée, on vous invite à découvrir l’article de Jean-François Clair consacré à la Direction de la Surveillance du Territoire (DST) au moment où paraît un ouvrage qu’il a coécrit, sur le même thème : La DST sur le Front de la guerre contre le Terrorisme (rubrique Livres).

Bonne lecture

Pascal Le Pautremat

(*) Pascal Le Pautremat est Docteur en Histoire Contemporaine, diplômé en Défense et Relations internationales. Il est maître de conférences à l’UCO et rattaché à la filière Science Politique. Il a enseig.
né à l’Ecole Spéciale militaire de Saint-Cyr et au collège interarmées de Défense. Auditeur de l’IHEDN (Institut des Hautes Études de Défense nationale), ancien membre du comité de rédaction de la revue Défense, il est le rédacteur en chef d’ESPRITSURCOUF.
Son dernier ouvrage « Géopolitique de l’eau : L’or Bleu » est présenté dans le numéro 152 d’ESPRITSURCOUF.