Cannabis légalisé en Californie : Un désastre
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Xavier Raufer (*)
Criminologue
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La « proposition 64 », la libération totale du cannabis en Californie, est entrée en vigueur depuis 2019. Tous, le « libéral » Los Angeles Times en tête, le crient à présent : cette « proposition 64 » sème le chaos. L’auteur nous explique pourquoi, avec une belle véhémence. Nous aurions pu classer son article dans la rubrique Humeurs.
Souvenez-vous du fan-club : Le Monde, Libération et tant de naïfs ou d’idiots utiles, le cannabis légalisé, fini le harcèlement des pauvres et minorités de couleur…La Californie enrichie de milliards de dollars…Dealers et gangs marginalisés par les forces du marché. Bref : gagnant-gagnant.
Sauf qu’en fait, la proposition 64 déchaîne l’anarchie : explosion des drogues illicites…Ravages écologiques…Braquages et kidnappings criminels…Corruption massive de fonctionnaires et d’élus. Pire, le crime organisé pille, évince et ruine le commerce légal du cannabis (boutiques et planteurs, souvent noirs ou latinos). Un cauchemar !
Environnement ravagé
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Sécurité, police, etc…Dur d’imaginer pays plus désorganisé que les Etats-Unis. 340 millions d’habitants, police fédérale, FBI, moins de 15 000 agents de terrain (special agents). La caricaturale Californie est plus minimale encore, côté répressif : au nord-ouest de l’Etat, le comté de Mendocino, fief de la culture du cannabis (Emerald triangle), compte 5 000 fermes illégales. Or, au bureau du shérif local, la force anti-drogue, c’est…un sergent et un aide à mi-temps. Le cannabis totalement libéré en 2018, la boite de Pandore libère un ouragan. D’abord le crime organisé est désormais impuni. Dans la vallée de Juniper Flat éclosent en quatre ans 1 300 fermes illégales : l’espace des serres de culture du cannabis y explose de…4 200 %. Sur 6 comtés de la vallée centrale (7 800 km²), on compte 2 230 km² de serres, dont moins de 10 % sont légales (même pourcentage dans tout l’Etat). En 2021, le shérif de San Bernardino rase 8 200 serres, illico rebâties.
Licites ou pas, ces serres donnent 4, voire 5 récoltes par an. De façon absurde, la production légale y est de 3 180 tonnes, interdite à l’exportation. Or la Californie en fume moins de 1 000 tonnes par an. Ajoutez les milliers de tonnes illicites, et voyez le résultat : 500 grammes se vendaient 2 000 dollars en 2018, 300 dollars en 2022. Le cannabis légal, taxé, coûte quelques 15 dollars le gramme, celui des gangs de 5 à 10 dollars le gramme. Inévitablement, le continuum licite du cannabis, planteurs et boutiques sous licence, court vers la faillite.
Dans ces vallées hors de toutes lois sur le travail, les ouvriers latinos sont réduits à l’esclavage, gardés dans des camps par des bandes armées et chiens d’attaque. Sur les routes, des camions d’hommes cagoulés et armés assurent l’ordre criminel. En mode « ruée vers l’or », toutes autorités locales ignorées. Abondent les fusillades, braquages, règlements de comptes et enlèvement. Epouvantés, les paysans de ces vallées n’osent plus y cultiver leurs champs. Les journalistes approchant ces terres sauvages sont menacés de mort et leurs voitures sabotées.
En plus, c’est un désastre écologique : rivières détournées, terres saturées de pesticides et de désherbants, animaux sauvages abattus. Les narcos pompent par millions de litres une eau déjà rare ; les puits des fermiers sont à sec.
Explosion criminelle
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Hypocrisie baba-cool : les « Coffee shops » d’Amsterdam sont en Californie d’aimables « dispensaires ». Quoique clandestins, ils prolifèrent. Une trentaine rien qu’à East-Los-Angeles. La police les ferme ? Ils rouvrent le lendemain, sous le contrôle des gangs (Crips, Bloods, Latin Kings, M-18, etc…). Ils vendent du cannabis bradé, mais aussi de la cocaïne, de l’héroïne, du meth’, etc… Des gangsters armés protègent des pillages ou braquages ces « dispensaires » criminalisés. A juste titre : certains gagnent 25 000 dollars par jour.
Corruption massive
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Délivrance de licences, permis d’achats de terres, bâtir ou agrandir des bâtiments et zones cultivées, forages pour l’eau ; les comités et municipalités de Californie décident ici de l’essentiel. A jet continu, ces élus et fonctionnaires locaux sont harcelés, menacés, intimidés par les narcos, eux-mêmes sous la féroce pression de donneurs d’ordre parfois loin de la Californie : cartels mexicains, triades de Hong-Kong. Tous connaissent une seule sanction en cas d’échec : la mort. Sur le terrain, les autorités locales sont démunies, face à une corruption massive, à coups de cadeaux de dizaines de milliers de dollars.
Au gouvernement de la Californie, qu’imaginent les coupables du désastre ? La fuite en avant. Plus de liberté encore ; suivre le « modèle » de la Colombie britannique voisine, où désormais la possession de tous les stupéfiants, héroïne, crack, meth’ ou autres, est dépénalisée pour quelques grammes.
Et la France ? Voici ses écologistes muets devant un immense ravage de l’environnement ; ses « socialistes » oublieux de milliers d’esclaves maltraités, voire tués, dans les fermes illicites de cannabis ; ses « antiracistes » délaissant ces noirs qui achètent du cannabis illicite bourré de pesticides et de poisons anti-nuisibles ; ses « féministes Gucci » aveugles aux femmes exploitées par centaines dans ces « dispensaires » sous emprise des gangs. Une presse d’information enfin, en « mode circulez, y’a rien à voir ».
Quelle honte !
(*) Xavier Raufer, criminologue, est directeur d’études au pôle sécurité-défense du Conservatoire National des Arts et Métiers. Il est Professeur associé à l’institut de recherche sur le terrorisme de l’université Fu Dan à Shanghaï, en Chine, et au centre de lutte contre le terrorisme, la criminalité transnationale et la corruption de l’Université Georges Mason (Washington DC). Directeur de collection au CNRS-Editions, il est l’auteur de nombreux ouvrages consacrés à la criminalité et au terrorisme, répertoriés dans la rubrique LIVRES d’ESPRITSURCOUF. Il a écrit “A qui profite le djihad ?” publié en mars 2021 aux Éditions Cerf, et présenté dans la rubrique LIVRES dans le numéro 164. |
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