Conscience tardive

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Pascal Le Pautremat (*)
Rédacteur en chef d’Espritsurcouf

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Ces dernières années, et surtout depuis 2020, divers milieux semblent découvrir l’expansionnisme de la Chine et la détermination de Pékin à conforter les capacités d’hyperpuissance d’un pays qui n’a cessé, depuis son entrée dans l’Organisation mondiale du commerce en 2001, de tisser sa toile via les « nouvelles routes de la soie ». Celles-ci concrétisent moins poétiquement les jeux de projection de capacités financières, d’investissement plurisectoriel, notamment dans l’immobilier, et d’exportations intercontinentales et massives de biens manufacturés.

Le président de la République populaire de Chine, Xi Jinping, en poste depuis 2013, a fait modifier la Constitution qui limitait la présidence à deux mandats consécutifs de 5 ans. Il devrait être reconduit, dimanche 23 octobre, pour remplir un troisième mandat sans contestation aucune. Il pourra ainsi, jusqu’en 2028, parachever son dirigisme maoïste et le culte de la personnalité inhérent, sachant qu’en 2025, son plan « Made in China », lancé officiellement en 2018, devrait être parachevé…

Aussi, à part constater un état de faits, et subir le déroulé de puissance plurisectorielle de la Chine, nous sommes bien impuissants.

De même, face à la dynamique des Etats-Unis, la prise de conscience du jeu cynique deWashington semble bien tardive chez certaines personnalités politiques. Ainsi, le 11 octobre 2022, devant les députés, le ministre de l’Economie et des Finances, Bruno Le Maire, reprochait aux Etats-Unis d’écouler leur gaz naturel liquéfié (GNL, gaz de schiste produit selon des procédés extrêmement polluants et énergivores) sur le marché européen à un prix quatre fois supérieur à celui demandé aux industriels américains. Et de craindre le renforcement du potentiel économique des Etats-Unis à l’encontre de celui de l’Europe : « Il n’est pas question que nous laissions le conflit en Ukraine se solder par une domination économique américaine et un affaiblissement européen »…Pourtant, c’est bien ce qui se poursuit depuis des décennies…

Une exploitation de gaz de schiste aux USA, où le prix du gaz est moitié moins cher que la moyenne mondiale. Photo DR.

L’exécutif des Etats-Unis est satisfait. Leur complexe militaro-industriel vend massivement des armes à l’Ukraine, Les fonds d’investissement américains y accaparent des espaces agricoles et industriels. Et divers conseillers, plus ou moins médiatiques, se réjouissent de cette situation. À  l’instar du général Jack Keane, ancien vice chef d’Etat-major de l’armée américaine, en retraite depuis 2003, qui, sur la chaine américaine Fox News, mardi 11 octobre, estimait que les Etats-Unis n’avaient investi « que » 66 milliards de dollars en Ukraine, cette année : « Cet investissement est très rentable, car pour relativement peu d’argent dans l’intérêt des États-Unis, ce ne sont pas des Américains, mais des Ukrainiens qui meurent dans la guerre avec la Russie ».

Par extrapolation, dans cette guerre par procuration, ce seront peut-être d’autres nationalités d’Europe qui pourraient basculer dans ce chaudron de plus en plus brûlant. 

Non, bien évidemment, la Chine comme les Etats-Unis ne sont pas dans la bienveillance et l’empathie, et font tout pour sortir l’Europe du ring. Tout est cynisme et propice à ce sempiternel jeux d’influence, sur fond de rapports de force de deux hyperpuissances qui font de l’Indopacifique et du Rimland leurs espaces prochains de confrontations…

Oui, prendre conscience de tous ces éléments, aujourd’hui, est bien tardif…

Alain Juillet, pour sa part, avec une liberté de ton qui lui est propre, porte un regard critique sur la dualité russo-ukrainienne, entre causes et conséquences, en marge des aléas tactiques qui laissent un brouillard quant à la durée de ce conflit qui témoigne d’un jeu de procuration (vidéo « la guerre russo-ukrainienne », rubrique Géopolitique).

L’agitation de la menace nucléaire sur fond de doctrines mises en avant fait réagir le général Norlain quant aux limites de la dissuasion nucléaire et de la riposte graduée, via un article intitulé : « La guerre en Ukraine signe l’échec de la dissuasion nucléaire » (rubrique Défense).

Dans un monde où les duplicités et tromperies institutionnalisées sont légions, il est loin d’être facile de faire acte d’éthique et de dénoncer des situations scandaleuses, juridiquement illégales. Stéphanie Gibaud fait partie de ces « lanceurs d’alerte » qui, souvent, paient le prix fort pour avoir agir par honnêteté et intégrité. Alexandre Boisson rappelle ainsi cette affaire : « Lanceur d’alerte : la femme qui en savait trop » (rubrique Sécurité).

Vous retrouverez également, la revue d’actualité d’André Dulou.

Enfin, à noter dans la rubrique Livres, nous vous présentons le dernier ouvrage de Julien Fargettas, Juin 1940. Combats et massacres en lyonnais, qui, entre Histoire et Mémoire, relate les circonstances dans lesquelles furent massacrés plusieurs dizaines de tirailleurs sénégalais. Une réalité que Julien Fargettas a fait sienne depuis plus de vingt ans pour mettre en lumière une tragédie longtemps minorée.

Bonne lecture