Béats devant l’IA
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Pascal Le Pautremat
Rédacteur en chef d’ESPRITSURCOUF
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En 2019, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) attirait l’attention en précisant que, d’ici 2040, la robotisation allait entraîné la disparition de 14% des emplois (16,6% en France notamment) – environ 300 millions d’emplois – tandis que l’automatisation allait en transformer plus de 30%.
Dans nos sociétés pénétrées de toute part par l’Intelligence artificielle qui est vue comme la panacée à tout crin, voilà que l’on nous présente, dès lors, une nouvelle application perçue comme une invention éblouissante. En fait, elle n’est qu’une invitation/incitation à la non-invention, au plagiat et à la fainéantise la plus bête qui soit.
Cette application se dénomme ChatGPT (acronyme grotesque à l’oreille) et fait déjà trembler – dit-on – l’entreprise Google qui craint une concurrence directe à son moteur de recherche. Ce « chatbot » ou agent conversationnel, conçu par l’entreprise américaine OpenIA, serait appelé à révolutionner la concrétisation des demandes en matière de réponses développées et argumentées. En somme, par extrapolation, il est possible, à partir de mot-clé(s), ou d’indications transmises vocalement, de demander l’IA de rédiger un développement conséquent sur un sujet de notre choix (si tant qu’il soit antérieur aux années 2020). Ainsi, il est envisageable d’obtenir une dissertation qui se tienne à laquelle, soit, il est possible d’apporter quelques aménagements, corrections détails et précisions.
En somme, pour celles et ceux qui vont céder à la tentation, les capacités de réflexion, de rédaction, d’imagination ou de restitution de connaissances des êtres humains vont être sérieusement entachées voire réduites à peau de chagrin.
Les plagiats sont déjà récurrents. Les grandes Ecoles et les universités ont fort à faire, en effet, pour déceler les dossiers et mémoires conçus avec des « copier-coller ». Mais là, il s’agira de véritables travaux usurpés qui seront difficilement décelables. Y compris dans les « créations musicales », les créations de tableaux, les écritures de courriers…et de courriels…
Cette folie intéresse pourtant, à des fins purement mercantiles, Microsoft qui envisagerait d’intégrer cette application dans son programme Microsoft Office, pour mieux concurrencer Google… « La fin justifie les moyens » dénonçait Nicolas Machiavel (1469-1527) quant au jusqu’auboutisme en politique. Cette maxime s’applique parfaitement, depuis longtemps , au néolibéralisme…
Pathétique…
En marge de cette aberration structurelle en faveur de l’abêtissement, nous vous proposons, dans ce Numéro 205, un sommaire qui répond aux questions conjoncturelles.
Ainsi, Henry Cuny, ancien ambassadeur en Arménie, nous interpelle sur les difficultés de ce pays, au gré d’une histoire souvent tragique, sous pression des Azeris comme des Turcs : « L’Arménie sur la brèche » (rubrique Humeurs)
Sur le plan international, les bouleversements et défis qui touchent l’Asie ne peuvent qu’inviter à dresser un état des lieux. Ce à quoi s’applique Tom Dash, avec son article intitulé « Asie 2023 – Tour d’horizon géopolitique et géoéconomique des enjeux régionaux » (rubrique Géopolitique).
La persistance de la guerre russo-ukrainienne, mais aussi les tensions palpables dans les Balkans, quoique passées sous silence par nombre de médias, ne peuvent que rappeler l’importance de parvenir à mettre en place une véritable politique de défense européenne dont les prémices remontent 1952-1954… Le général Jean-Paul Perruche insiste ainsi sur son caractère dès lors indispensable et pressant : « Création d’une réelle capacité collective d’action militaire européenne : une urgence absolue » (rubrique Défense).
Aux Etats-Unis, dans un tout autre domaine, les autorités californiennes prennent conscience des graves conséquences qu’engendre la libéralisation du cannabis. Loin d’être dissuadée, la criminalité, explose, sans compter les jeux de corruption et les répercussions environnementales. Xavier Raufer nous dit tout : « Cannabis légalisé en Californie : Un désastre. » (rubrique Sécurité).
En matière de publication à souligner dans ce numéro, notre choix s’est porté sur le dernier livre de Pierre Martinet, ancien agent du Service Action de la DGSE, Pris en otage (Mareuil éditions) qui relate sa douloureuse et terrible épreuve traversée en Libye en 2011, au début de la révolution (rubrique Livre).
Enfin, nous retrouvons la revue d’actualité d’André Dulou qui aborde notamment la question des retraites, mais aussi la politique agricole commune, sans oublier une plongée dans les questions de défense et de sécurité complémentaires.
Bonne lecture.
(*) Pascal Le Pautremat est Docteur en Histoire Contemporaine, diplômé en Défense et Relations internationales. Conférencier et chargé de cours dans l’Enseignement Supérieur, il a enseigné à l’Ecole Spéciale militaire de Saint-Cyr et au collège interarmées de Défense. Il intervient aussi dans les sociétés et les structures publiques en matière d’analyses géopolitiques et géo-économies. Auditeur de l’IHEDN (Institut des Hautes Études de Défense Nationale), ancien membre du comité de rédaction de la revue Défense, il est le rédacteur en chef d’ESPRITSURCOUF. Son dernier ouvrage « Géopolitique de l’eau : L’or Bleu” est présenté dans le numéro 152 d’ESPRITSURCOUF du 30 novembre 2020 |
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