Face au terrorisme :
le danger du fatalisme politique

Pascal Le Pautremat (*)
Rédacteur en chef d’Espritsurcouf

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Difficile de ne pas souligner la dixième commémoration des attentats de janvier 2015 : ceux du 7 janvier, à l’encontre de la rédaction du Journal satirique Charlie Herbdo (douze morts dont huit membres de la rédaction), du 9 janvier, dans le magasin Hypercacher (4 morts outre 4 terroristes tués, près de 80 blessés dont plus d’une soixantaine marquée par le syndrome post-traumatique) outre l’assassinat d’une policière municipale à Montrouge. Et fin 2025, la France commémorera le massacre du 13 novembre : 132 victimes (dont deux par suicide quelque temps après les faits, et 413 blessés dont près d’une centaine qui survit coûte que coûte, avec de lourdes séquelles.

Sans revenir sur les attentats de 1995-1996, perpétrés, à l’époque, par les sbires du Groupe islamique Armé (GIA) algérien, on constate aisément que, depuis 20 ans, les attentats causés par les islamistes ne cessent de se répéter, avec des intensités variables, en ciblant, ces dernières années, des professeurs, des représentants du christianisme, des membres de la communauté juive, en organisant des campagnes d’intimidation contre des universitaires, des chercheurs, des intellectuels qui ont le courage – ou le tort ? – de dénoncer l’emprise du fondamentalisme musulman dans notre société, son déploiement tentaculaire distillant un prosélytisme sournois, incisif, un djihadisme épisodique, mais profondément ancré et inscrit dans la durée…

 

En réaction, journalistes, commentateurs de tout ordre ne cessent de palabrer, d’intellectualiser à outrance une réalité factuelle sans que l’on ose s’emparer précisément, consciencieusement de la question. Le plus souvent, on laisse à penser que les crimes et attentats perpétrés au nom de l’Islam sont des épiphénomènes liés à des dérives comportementales, aux soucis psychiatriques des responsables… On préfère faire état d’actes isolés, sauf pour les attentats de 2015 certes. Rarement, ou alors avec un certain malaise, il est clairement fait allusion à des opérations sciemment réfléchies, bénéficiant d’un appui logistique, au nom de l’Etat islamique qui ne cesse de reprendre de l’ampleur et d’activer de nombreux réseaux transfrontaliers autant que transcontinentaux. Avec le soutien tacite des courants fondamentalistes qui se gardent stratégiquement de basculer dans le djihadisme, préférant opter pour les joutes en communication et en judiciarisation face à tous ceux qui auraient l’outrecuidance de les critiquer.

Les commémorations, les moments de recueillement, les marches blanches, où le pathos est légitiment fort, ne sont – hélas – pas des réponses suffisantes ou salvatrices pour s’inscrire dans une véritable contre-offensive collégiale. Déléguer la prévention et la neutralisation des menaces aux seuls services de renseignement intérieur et extérieur – qui connaissent, eux, parfaitement la gravité de la situation – est une faute lourde d’appréciation citoyenne de la réalité.

Il faut prendre conscience de la force de nuisance de l’islam radical, bien présent en France et dans nombre de pays européens ; dénoncer son prosélytisme qui favorise la fragmentation de la communauté musulmane d’abord et des communautés nationales ensuite. Si, en réponse à l’affirmation de ces vérités, certains courants politiques et associatifs crient de manière mesquine au racisme, à l’antisémitisme (partiel), c’est qu’assurément, ils ne connaissent rien à l’islam pluriel, et ignorent, pour des raisons dogmatiques ou électoralistes, le fardeau de fondamentalisme islamique qui gangrène non seulement l’Occident mais le monde musulman.

On ne compte plus en effet le nombre de pays qui, entre Afrique, Moyen-Orient et Asie centrale, voient s’affirmer des régimes procédant à des applications des plus rigoristes et restrictives des préceptes coraniques, allant jusqu’à museler l’épanouissement de l’être humain, et des femmes en particulier.

Si certaines communautés intégristes, en Europe ou en France, sont favorables à de tels régimes, rien ne les empêche, après tout, d’envisager une installation dans lesdits pays, qui leur proposeront peut-être, dans ce cas, une vie qu’elles estiment plus en adéquation avec leurs convictions. Mais de là à vouloir nous imposer, en Europe, leurs approches dogmatiques, il est grand temps que les corpus politiques et que les citoyens consciencieux sachent dire non et ne tremblent pas de le faire savoir, et d’agir en conséquence, avec force et détermination, face au jeu insidieux notamment des Frères musulmans et de leurs réseaux plurisectoriels.

L’esprit de résistance ne relève pas seulement des périodes de l’Histoire. Il ne s’agit pas seulement de le regarder comme relevant de quelques phases historiques, avec une teinte de romantisme, porté par des Femmes et des Hommes exemplaires, célèbres ou anonymes, aujourd’hui quasiment toutes et tous disparus, malheureusement. L’esprit de résistance fait aussi partie du temps présent et doit nous galvaniser pour endiguer toute dérive supplémentaire de notre vie quotidienne et institutionnelle. Encore faut-il ne pas être paralysé par la peur…

 

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Pour ce premier numéro de l’année, et compte tenu de l’actualité, Laure Fanjeau illustre le thème du terrorisme en France par divers documents vidéos qui offrent ainsi une rétrospective sur ces événements sombres, tout en mettant en avant le témoignage d’Hugo Macheron, spécialiste du djihadisme en Europe (rubrique VIDEOS et PODCAST).

Espritsurcouf, vous propose également deux articles émanant d’anciens diplomates. Pour le premier, il s’agit d’une rétrospective de l’année 2024, à travers une vue d’ensemble des relations internationales. Paul Dahan n’est guère enthousiaste quant à ce qu’il a pu retenir en la matière et dont il nous livre, ici, la quintessence : « 2024, Apocalypse now » (rubrique HUMEUR).

Pour le second, c’est une plongée dans l’Asie centrale à laquelle nous invite Pierre Andrieu. Il précise combien cette vaste région, aux importantes ressources, suscite convoitises et jeux de puissance de la part de la Russie, de la Chine, mais aussi des Etats occidentaux « Un acteur encore trop méconnu en Europe : l’Asie centrale » (rubrique GEOPOLITIQUE).

 

Sur le champ hexagonal et sécuritaire, Xavier Raufer tient à rappeler combien il est juste de faire le distinguo entre banditisme et mafia, dans un contexte où sphères médiatique et politique ont tendance à gommer les nuances (rubrique SECURITE).

André Dulou, enfin, avec son SEMAPHORE, témoigne d’une réalité conjoncturelle toujours tumultueuse (rubrique SEMAPHORE).

Conjointement à nos articles, nous mettons en avant le dernier ouvrage, paru il y a quelques mois , de Frédéric Guelton, ancien officier supérieur, Saint-Cyrien, docteur en histoire diplômé de l’université de Paris, Panthéon-Sorbonne, qui œuvra près de 30 ans au ministère de la Défense et notamment comme chef du département de l’armée de Terre du service historique de la défense. Il a également enseigné l’histoire des relations internationales à l’Institut d’Études Politiques de Paris (Sciences-Po.) et continue d’assurer des cours d’histoire militaire à École spéciale militaire de Saint-Cyr, outre la co-direction d’un séminaire d’histoire appliquée à la formation au management de l’EDHEC. Frédéric Guelton est par ailleurs coutumier de partenariat avec le monde audiovisuel, au sein duquel il opère comme conseiller historique au profit de nombreux documentaires dont la série Apocalypse, la Première Guerre mondiale pour France Télévisions.

Eminent spécialiste et fin historien doté d’une belle plume, Frédéric Guelton propose en effet un magnifique ouvrage précis et richement illustré de photos en couleurs, sur le débarquement en Provence (août 1944) (rubrique LIVRES).

 

 

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Bonne lecture

Pascal Le Pautremat

 

(*) Pascal Le Pautremat est Docteur en Histoire Contemporaine, diplômé en Défense et Relations internationales. Il est maître de conférences à l’UCO et rattaché à la filière Science Politique. Il a enseigné à l’Ecole Spéciale militaire de Saint-Cyr et au collège interarmées de Défense. Auditeur de l’IHEDN (Institut des Hautes Études de Défense nationale), ancien membre du comité de rédaction de la revue Défense, il est le rédacteur en chef d’ESPRITSURCOUF.
Son dernier ouvrage « Géopolitique de l’eau : L’or Bleu » est présenté dans le numéro 152 d’ESPRITSURCOUF.

 

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