Pouvait-on éviter l’attaque terroriste contre Charlie Hebdo ?
Eric Stemmelen (*)
Commissaire divisionnaire honoraire de Police et ancien responsable du S.P.H.P.
K
Alors que les menaces terroristes restent quasi quotidiennes en France, l’auteur, fin expert, revient sur le drame qui frappa l’équipe de rédaction du journal satirique et, par voie de conséquence, des policiers. Et de s’interroger sur les failles d’un dispositif de protection qu’il n’aurait pas fallu alléger. Les propos n’engagent que leur auteur.
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Dix ans après les actes terroristes commis par les frères Kouachi à l’encontre de Charlie Hebdo, le 7 janvier 2015, au-delà de la légitime émotion du peuple français venant de subir la plus grande attaque terroriste depuis la guerre d’Algérie, il convient d’examiner l’enchainement des décisions successives prises avant l’attentat et s’interroger sur la pertinence de celles-ci en fonction de l’évolution des menaces.
Les menaces sur Charlie ont-elles été prises au sérieux par les services de police ?
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La publication par Charlie Hebdo des caricatures de dessinateurs danois et suédois mettant en scène le prophète Mahomet en 2006 a rapidement entraîné des menaces de mort proférées à l’encontre du journal Charlie Hebdo.
En 2006, un car de gendarmes avait été placé pendant quelques mois devant les locaux du journal menacé qui se trouvait alors dans le quartier du Marais. L’ancien directeur de Charlie Hebdo, Philippe Val, et le dessinateur Cabu étaient placés sous la protection du SPHP (Service de Protection des Hautes Personnalités).
En 2011, cette protection est abandonnée puis reprise après la publication de la caricature « Charia Hebdo », concernant les élections en Tunisie, quand un cocktail molotov est lancé sur la façade des nouveaux locaux du journal dans le XXème arrondissement de Paris : la Préfecture de Police de Paris remet en place un car de police et le SPHP protège à nouveau quelques membres de la rédaction du journal (Charb (Stéphane Charbonnier), Riss, Luz).
Dès cette époque, il est clair que les services du ministère de l’Intérieur (Préfecture de Police et SPHP) n’ont pas compris que ce type de menace émanant d’islamistes fanatiques devait se maintenir dans le temps. Or, il y avait un précédent : en 1991 Chapour Bakhtiar, dernier Premier Ministre du Shah d’Iran, avait été assassiné suite à une fatwa émise par les religieux iraniens et qu’il avait fallu 11 ans aux assassins pour parvenir à leurs fins, après une première tentative d’assassinat en 1980 à son domicile de Neuilly sur Seine ; tentative qui avait couté la vie au policier Jean Michel Jamme.
Les similitudes sont frappantes avec Charlie Hebdo : 11 ans d’un côté, 9 ans de l’autre, des signes avant coureurs : des menaces et des cas concrets (tentatives d’assassinat, cocktail molotov).
En 2012, 2 individus sont arrêtés pour appel au meurtre de Charb et de la rédaction de Charlie Hebdo.
Mais c’est en mars 2013 que les menaces se précisent de façon explicite : Charb apprend que sa tête est mise à prix avec 9 autres hommes (dont Salman Rushdie et Lars Vilks) et 2 femmes pour « crime contre l’Islam » dans le magazine Inspire, trimestriel luxueux rédigé sur papier glacé exclusivement en anglais, téléchargeable sur internet, qui s’adresse aux apprentis djihadistes occidentaux et qui a été fondé en 2010 par AQPA (Al-Qaida dans la péninsule arabique) au Yémen.
Cette menace très précise sur la vie de Charb était connue puisque le journal Métro news en fait mention dans son numéro du 3 mars 2013. Et dès juillet 2010, le journaliste Georges Malbrunot du Figaro avait signalé les menaces de ce magazine.
Se pose alors une question cruciale : l’UCLAT (unité dépendant directement du directeur général de la police nationale chargée d’évaluer l’état de la menace selon une classification allant de menace latente à attentat imminent) a-t-elle informé le SPHP et la Préfecture de Police ?
Ce point mérite d’être éclairci car la presse rapporte que c’est Charb lui-même qui a informé les services de police. À la suite de son intervention, sa sécurité devient une protection rapprochée (3 policiers du SPHP en permanence) et non plus un simple accompagnement de sécurité.
Mais 6 mois après, le SPHP réduit l’équipe de protection à 2 policiers. D’après la presse, l’explication officielle était que la menace avait baissé, le ministère de l’Intérieur ayant répondu qu’à cette époque la protection de Charb était à la hauteur de la menace !
La sécurité de Charb a donc été diminuée alors qu’une menace précise sur sa personne émanait d’Al-Qaida.
Cette décision fait manifestement suite à un tract du syndicat Alliance bien mal inspiré, ainsi rédigé :
« Le 4 avril, lors d’une audience auprès du Directeur de la DOPC(Direction de l’Ordre Public et de la Circulation de la Préfecture de Police), nous avons exigé l’arrêt immédiat de la mission « Charlie Hebdo ». Depuis plus de 7 mois les compagnies d’intervention fournissent jusqu’à 9 collègues par jour pour la protection des locaux privés d’un journal. Inadmissible !!! »
C’est aussi la même année, en 2013, que le SPHP devient le Service de la Protection (SDLP) en intégrant le Service Central Automobile et le Service de Sécurité du Ministère de l’Intérieur. Cette réforme incite le chef de service à supprimer 125 postes de policiers.
Au cours de l’été 2014, alors que le journal déménage pour la 3ème fois dans le 11ème arrondissement rue Nicolas Appert, les services de la Mairie et la Préfecture de Police conduisent un audit de sécurité qui recommande la pose d’un digicode devant la porte du journal au 2ème étage, 1 visiophone et un sas avec 2 portes successives.
En réalité, la réceptionniste n’a pas eu de visiophone mais un simple interphone et pour des raisons financières le journal n’a pas installé de sas.
En ce qui concerne l’audit, deux questions se posent : a-t-on recommandé à Charlie H. de créer une pièce de sécurité dite « safety room » permettant en cas d’agression de mettre le personnel à l’abri a t-on préconisé aux responsables de Charlie de changer régulièrement les dates de la réunion de rédaction ?
L’attentat du 7 janvier 2015 a eu lieu quand tous les membres de la rédaction étaient présents.
Or une des bases essentielles de la sécurité des personnes consiste justement à varier les habitudes.
En septembre 2014, la voiture de police qui était en faction devant le journal est supprimée et est remplacée par des patrouilles. Explication de la Préfecture de Police : le dispositif était peu efficace à cause des multiples entrées de l’immeuble.
Cette explication n’est pas satisfaisante car elle oublie l’aspect préventif et dissuasif d’une présence policière permanente ; encore auraitt-il fallu laisser en place les barrières de sécurité.
En pratique, un passage, toutes les 30 minutes, d’une voiture n’est pas dissuasif : la sécurité est un ensemble : il faut à la fois des barrières et des hommes.
Pire, la protection de Charlie a été allégée justement au moment où le risque terroriste en France augmentait. Le chef de l’UCLAT, Loïc Garnier, de façon prémonitoire l’indiquait le 15 septembre 2014 en affirmant que la question n’était plus de savoir si nous aurions un attentat en France mais quand.
Le même jour, un individu passe en voiture devant Charlie et formule à un journaliste présent sur place, des menaces à l’encontre de Charlie : rien d’inquiétant pour le Ministère de l’Intérieur qui identifie l’individu !
En réalité, ce faisceau concordant de menaces et les multiples signaux avant coureurs du drame n’entraînent aucun renforcement de la sécurité assurée par la Préfecture de Police et le SPHP. Tout se passe comme si personne ne croyait à la réalité de la menace contre Charlie Hebdo et contre Charb.
Le paradoxe qui révèle le manque de discernement des autorités veut que les barrières et le car de gendarmes – ou de policiers peu importe – ont été remis en place rue Nicolas Appert alors que Charlie Hebdo avait déménagé pour être hébergé par le journal Libération .
Le Premier Ministre Valls a raison de parler dès le 9 janvier 2015 de « failles » dans le renseignement et pour cause : les frères Kouachi et Coulibaly n’étaient pas dans le « viseur » immédiat de la DGSI (Direction Générale de la Sécurité Intérieure).
L’UCLAT a t-elle estimé que la menace sur Charlie était latente et non précise alors que le simple fait qu’Al-Qaïda mentionne expressément Charb sur la liste de personnes à abattre aurait dû suffire à considérer cette menace comme grave et imminente ?
La Préfecture de Police, et particulièrement la DOPC, a toujours sous-évalué la menace en ne mettant pas en place un dispositif adéquat. C’était évidemment possible puisque ce dispositif a été mis en place après les attentats. Mais c’était avant qu’il fallait le faire : là aussi, le temps a joué contre les services officiels.
L’habitude, les pressions syndicales, les contraintes budgétaires. ne sont pas étrangères aux décisions successives prises qui révèlent d’ailleurs un manque de constance dans le temps : mise en place de car de police puis suppression ; mise en place de voitures de police puis suppression ; mise en place puis suppression de barrières . Et cela malgré une menace croissante de plus en plus précise sans parler de l’absence de garde statique remplacé par des rondes et patrouilles.
Comment ne pas penser que les terroristes ont observé l’allégement du dispositif de sécurité et sont passés à l’action à l’instant où il était réduit au minimum ?
Pour les mêmes menaces, la police danoise a mis en place autour du journal Jyllands Posten un dispositif de sécurité statique, même imparfait, qui a montré son efficacité : Vilks est toujours vivant et Charb est mort !
La sécurité personnelle de Charb a-t-elle été bien assurée par le Service de la Protection ?
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Une menace émise par Al-Qaïda n’est pas une menace à prendre à la légère.
Charb figurait sur une liste nominative de personnes à abattre. Cette seule circonstance aurait justifié une réelle protection rapprochée de Stéphane Charbonnier.
La Division des missions temporaires, qui dépend de la Sous-Direction de la Protection des Personnes, est en charge des personnalités menacées et donc chargée de la sécurité de Stéphane Charbonnier.
Ce type de mission obéit à des règles strictes qui ont été codifiées, ces dernières années, de façon à intégrer dans des textes officiels la pratique professionnelle de la protection des personnalités.
Les textes régissant la sécurité des personnalités ont-ils été appliqués ? Cette question est essentielle car leur non application rend les missions irrégulières et entraîne la responsabilité de l’Etat.
L’article 5 de l’arrêté du 12 août 2013 signé par Manuel Valls est ainsi rédigé :
« La sous-direction de la protection des personnes assure, sur le territoire français et à l’étranger, la protection rapprochée ou l’accompagnement de sécurité de personnes françaises ou étrangères. Elle est chargée de la sécurité des membres du gouvernement et des personnalités françaises auxquelles en fonction des risques et menaces évalués par les services spécialisés et sur décision du ministre de l’Intérieur, il est accordé de telles mesures »
Cet article fait référence aux notions de protection rapprochée et d’accompagnement de sécurité qu’il convient de bien distinguer et qui est explicitement indiqué dans le texte fondateur du SPHP crée par l’arrêté du 19 octobre 1994 signé par le ministre de l’Intérieur, Charles Pasqua, ainsi que le précise l’article 1 :
« Les missions de protection des hautes personnalités assurées par le service de protection des hautes personnalités sont de deux types :
-les missions de protection rapprochée nécessitant la présence continue d’au moins trois fonctionnaires armés auprès de la personnalité protégée ;
-les missions d’accompagnement de sécurité générale nécessitant la présence continue d’un seul fonctionnaire armé auprès de la personnalité protégée. »
En matière de protection rapprochée, les policiers constituent le triangle de sécurité autour de la personnalité qui doit couvrir les 360° du champ visuel. Ils doivent également disposer au minimum d’un véhicule de sécurité conduit par un conducteur expérimenté et armé pour suivre le véhicule de la personne protégée. Le dispositif minimum de protection rapprochée est donc de 4 policiers. Avec au moins une relève pour couvrir l’amplitude horaire d’activité de la personne à protéger, on parvient, au minimum, à l’affectation de 8 fonctionnaires de police pour une seule personnalité, et dans le cas où la menace est considérée d’intensité faible ou moyenne. Pour une menace plus importante ou plus précise il faut disposer d’une voiture supplémentaire avec un conducteur et 1 ou 2 officiers de sécurité. Cette voiture, dite S 1, se place devant le véhicule de la personnalité. Ce dispositif est indispensable pour assurer une bonne sécurité. En 1977, Hans Martin Schleyer, le patron des patrons allemands a été enlevé et tué par les terroristes de la bande à Baader. Il circulait en Mercedes blindée et n’avait qu’une une voiture de sécurité en suiveuse. Les conducteurs et les gardes du corps ont tous été tués (on a retrouvé pas moins de 300 balles de pistolet mitrailleur sur place !). L’enlèvement a pu réussir tout simplement car une terroriste, déguisée en mère de famille, avait jeté un landau supposé contenir un bébé devant la voiture de Hans Martin Schleyer !
Comme pour Chapour Bakhtiar, qui se souvient de Hans Martin Schleyer ?
L’utilité de la voiture de sécurité devant celle de la personnalité est évidente. Elle s’arrête devant un obstacle comme celui-ci tandis que la voitures de la personnalité et la voiture suiveuse en sécurité font demi tour. Ceci suppose bien évidemment que les 3 conducteurs concernés soient entraînés à ce type de manœuvre et en liaison radio permanente. Ce dispositif nécessite donc 3 conducteurs et 5 officiers de sécurité au minimum soit 8 personnels en permanence (16 au total avec les relèves). Par ailleurs, une bonne protection nécessite aussi d’avoir des policiers envoyés en précurseurs sur chaque site visité ainsi qu’une garde des lieux de résidence de la personne menacée.
Une vraie protection rapprochée mobilise donc beaucoup d’effectifs, coûte cher et peut durer des années.
La meilleure sécurité consiste toutefois à changer constamment ses habitudes, être imprévisible pour déjouer les reconnaissances des futurs agresseurs. Ceci s’appelle la culture de sécurité qui ne coûte rien. Encore faut-il que la personnalité menacée y adhère car sa survie est à ce prix.
On peut donc légitimement poser la question suivante : connaissant les menaces d’A-Quaida visant nominativement Charb, pourquoi celui-ci n’avait-il pas de protection rapprochée ? Au début, Charb avait une équipe de 4 policiers attachés à sa protection (8 en fait avec les relèves). Cette équipe a été par la suite divisée par 2 et neconsistait plus qu’à un simple accompagnement de sécurité et non plus à une protection rapprochée.
Franck Brinsolaro, mort sur place, était l’officier de sécurité de Charb ; le second policier était tout simplement parti « faire des courses ». M. Brinsolaro participait à la réunion de rédaction de Charlie Hebdo. Un officier de sécurité n’a pas à participer aux réunions de rédaction d’un journal. Sa place était à l’extérieur devant la porte de la rédaction et son collègue aurait du être à l’entrée des locaux.
Le syndrome bien connu des liens de proximité entre la personnalité et son garde du corps avait déjà été noté lors du suicide de Pierre Bérégovoy avec l’arme de service de son officier de sécurité.
La décision d’accorder une protection rapprochée ou un accompagnement de sécurité générale est exclusivement du ressort des autorités gouvernementales en l’occurrence le ministre de l’Intérieur (ou par délégation de pouvoir son Directeur de Cabinet) .
Bien évidemment, la décision ministérielle doit être éclairée par l’avis de spécialistes. Le ministre de l’Intérieur et ses proches collaborateurs ont-ils été informés du processus décisionnel et de la distinction entre protection et accompagnement de sécurité et des conséquences qu’entraînait le choix de l’une ou l’autre formule en effectifs et en coût ?
L’information du ministre avant toute prise de décision est fondamentale
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L’article 14 de l’arrêté du 12 Août 2013 signé par le ministre de l’Intérieur, Manuel Vallsreprend l’article 13 de l’arrêté du 17 décembre 2008 signé par la ministre de l’Intérieur Alliot-Marie) est ainsi rédigé :
« Une commission présidée par le directeur de cabinet du ministre de l’intérieur ou son représentant rend un avis au ministre de l’intérieur en fonction des risques et menaces évalués par les services spécialisés sur l’octroi ou le maintien de toute mesure de protection rapprochée ou d’accompagnement de sécurité ainsi que le cas échéant, sur la nature et le degré de protection accordée.
Cette commission se réunit à tout moment à la demande du ministre de l’intérieur et au moins deux fois par an. Elle est composée exclusivement d’agents de l’Etat et comprend le directeur général de la police nationale, le directeur général de la gendarmerie nationale, le préfet de police de Paris, le chef du service de la protection et le chef de l’unité de coordination de la lutte antiterroriste, qui peuvent être représentés. Il peut être fait appel le cas échéant à toute personne dont l’expertise est requise. Le Ministre de l’intérieur peut décider de ne pas consulter la commission lorsque la situation le justifie, notamment au regard des délais nécessaires à la commission pour se réunir et rendre son avis »
Pendant des années, le ministère de l’Intérieur n’a pas appliqué ses propres textes en ne réunissant pas cette commission. En 2010, la Cour des Comptes fait un audit du SPHP. Son pré-rapport rédigé par Alain Pichon, Président de la 4ème chambre de la Cour des Comptes relevait que toutes les mesures de protection ou d’accompagnement qui n’étaient pas systématiquement justifiées par un niveau de menace correspondant n’étaient pas réglementaires.
La Cour indiquait que la décision d’attribution, qui appartient au ministre de l’Intérieur, demeurait informelle, et considérait que cette situation avait pour effet de déresponsabiliser l’autorité compétente pour l’attribution des dispositifs de protection ou d’accompagnement. La Cour estimait en outre que le fait de n’avoir pas réuni la commission en question avait pour conséquence de laisser subsister la déconnection entre la protection assurée par le SPHP et le niveau de menace. En conséquence, la Cour relevait que la commission, désormais clef de voute du dispositif, n’avait pas formulé d’avis sur les différentes missions assurées et rendait de fait irrégulières les missions qui n’étaient pas justifiées par un niveau de menace particulier. La Cour recommandait donc fort logiquement que la commission devait se réunir sans tarder, que les décisions attribuant les protections assurées par le SPHP devaient être formalisées par un écrit en précisant la date et l’auteur et que les protections non institutionnelles devaient n’être accordées que pour une durée limitée et révisée périodiquement.
La question qui se pose alors est de savoir si cette commission s’est réunie, si elle s’est prononcée sur la sécurité de Charb et si elle avait recommandé de transformer la protection rapprochée de Charb (déjà insuffisante à l’origine) en simple accompagnement de sécurité générale ?
Enfin, la Commission parlementaire annoncée de nombreuses fois ne s’est jamais constituée, à la différence de celle consacrée aux attentats sur le Bataclan du 13 novembre 2015. Il restera donc un doute sur le processus décisionnel de la sécurité de Charlie Hebdo et de Charb en particulier.
Conclusion
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Dix ans après les événements de janvier 2015, beaucoup de questions restent toujours d’actualité.
Le Premier Ministre a eu beau parler de failles ; on attend toujours de savoir lesquelles.
Y a-t-il eu défaillance des services de renseignement (DGSI et UCLAT) et des erreurs d’appréciation sur la menace et les mesures à prendre pour y faire face par la Préfecture de Police de Paris et le Service de la Protection ?
La mission de protection rapprochée est extrêmement difficile car elle nécessite un professionnalisme constant et permanent.
La France a les moyens d’assurer une protection à des personnalités menacées à condition d’avoir la volonté de supprimer les missions de sécurité assurées par le service de la Protection au profit de personnalités françaises qui n’ont pas le rang protocolaire suffisant et qui ne sont pas menacées étant précisé que seul les anciens présidents de la République, dans les textes, ont droit à bénéficier d’ officiers de sécurité. Ces missions de confort ne sont pas les seules ; il y a aussi des missions de complaisance à supprimer, celles qui consistent à assurer un accompagnement de sécurité au bénéfice de personnalités étrangères (des pays du Golfe, du Maghreb et de l’Afrique sub-saharienne) en visite privée en France alors qu’elles ne sont ni chefs d’Etat, ni chefs de gouvernement ni menacées. Ces missions ne visent qu’à favoriser le passage de gens fortunés au milieu de la circulation ou à stationner dans des endroits interdits au simple citoyen.
Enfin, il faut noter que personne ne s’est estimé responsable de ce qui est arrivé à Charlie Hebdo ni ne s’est excusé de ses propres insuffisances, ni n’a jugé opportun de démissionner.
On célèbre chaque année l’anniversaire de ces tragiques événements sans répondre à ces deux questions fondamentales : Pourquoi la sécurité sur Charlie Hebdo et sur Stéphane Charbonnier baissait alors que la menace augmentait ? Et pouvait-on éviter les attentats de janvier 2015 ?
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(*) Eric Stemmelen, commissaire divisionnaire honoraire, a effectué sa carrière en France et à l’étranger. En France, d’abord à la direction centrale de la police judiciaire, puis dans les organismes de formation et enfin au service des voyages officiels. Responsable de la sécurité des sommets internationaux et des conférences internationales, chargé de la protection rapprochée des Chefs d’Etat et de Gouvernements étrangers, il a été mis comme expert à la disposition du ministère des affaires étrangères, pour la sécurité des ambassades françaises, de leur personnel et des communautés françaises dans de nombreuses capitales (Beyrouth, Kaboul, Brazzaville, Pristina, entre autres). Diplômé de l’Académie Nationale du FBI, de la 7ème promotion de l’IHESI, il est aujourd’hui consultant et expert dans les domaines de la Sécurité (au Conseil de l’Europe, par exemple). |
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