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EuroDéfense France (*)


Si la priorité doit être donnée à la sécurité sanitaire et à l’emploi, EuroDéfense France propose, au-delà du Fonds européen de défense, un plan de relance industrielle dans le secteur de la défense et de la sécurité. D’abord un plan de sauvegarde des entreprise, de leurs outils industriels et de leurs compétences les plus critiques et les plus menacés. Puis un plan de relance proprement dit à la sortie de la crise, sous forme de commandes de matériels, y compris par l’Union européenne.

La crise du COVID-19, qui a sidéré le monde, ne constitue-t-elle pas l’un de ces bouleversements majeurs qui peuvent changer le visage de la planète ? L’histoire nous le dira. Quoiqu’il en soit, elle impose à l’Union Européenne  un questionnement sur ses valeurs fondatrices : solidarité, dignité de l’être humain, liberté, démocratie, état de droit et paix. Cette crise sanctionne une triple rupture, rupture du monopole de l’Occident sur l’histoire du monde, rupture du leadership américain hérité de la deuxième guerre mondiale et rupture avec une globalisation incontrôlée. Il faut en tirer les enseignements. Sachant que c’est souvent dans l’adversité que les Européens ont trouvé la volonté et le courage politique de faire avancer leur union, l’opportunité se présente de la doter des attributs qui feront d’elle un acteur mondial reconnu et respecté.

Dans un environnement de plus en plus menaçant, l’Europe aura comme première responsabilité d’assurer effectivement la sécurité de ses citoyens dans tous les domaines et la défense de leurs intérêts, sur le continent et partout dans le monde.

Priorité à la sécurité sanitaire et à l’emploi


La crise sanitaire a mis la solidarité européenne à l’épreuve, en faisant resurgir initialement les égoïsmes nationaux. Cependant, la Commission européenne a réagi dès le 28 janvier en activant son mécanisme de crise. Elle a réuni des fonds publics et privés pour financer la recherche sur les vaccins, les diagnostics et les traitements ; elle a créé une réserve commune de matériel médical ; elle a contribué au rapatriement de nombreux Européens bloqués à l’étranger. La solidarité entre les pays s’est finalement exprimée au niveau du transport médical et de l’accueil de patients dans les hôpitaux non surchargés.

Des malades français ont été soignés dans des hôpitaux européens non surchargés. Photo aéroport de Strasbourg.

L’Union Européenne a maintenant la responsabilité de soutenir activement la relance économique, non pas avec un nouveau Plan Marshall, qui viendrait de l’extérieur, mais avec des fonds européens. Des initiatives sont en cours pour compenser ce qui est déjà annoncé comme une chute vertigineuse, une baisse de 7,4 % du PIB de l’UE pour 2020 selon la Commission européenne. La priorité sera donnée à juste titre à la sécurité sanitaire et à l’emploi. Par ailleurs, les enjeux de préservation de la planète, au-delà des changements nécessaires des comportements individuels, vont aussi s’inscrire dans le contexte général et peser sur l’ensemble des contraintes budgétaires de nos pays.

Une crise qui a révélé « notre vulnérabilité »


L’UE se retrouvera plus isolée dans le nouveau contexte mondial et, sans doute, plus vulnérable. C’est pourquoi ses membres devront la doter des moyens de se faire entendre et respecter en tant qu’acteur mondial, afin de créer l’espace de confiance et de solidarité qui lui manque encore. Si l’autonomie stratégique est un enjeu de survie dans les domaines sanitaire, industriel, énergétique, économique et diplomatique, la première responsabilité de l’UE, en liaison avec les États, sera de contribuer efficacement à la sécurité de ses citoyens.

La sécurité sanitaire fera partie des premières initiatives. Une politique de sécurité sanitaire devrait voir le jour, dotée d’une base industrielle et technologique dédiée, à la fois aux échelons national et européen. Cette sécurité sanitaire devra s’inscrire dans une appréciation globale des risques et menaces. Si la menace biologique, aujourd’hui concrétisée par le coronavirus, faisait partie des menaces potentielles depuis des décennies, elle n’avait pas fait l’objet de mesures concrètes d’anticipation.

Cette crise imprévue a révélé notre vulnérabilité. Elle a été mise à profit par certains pays pour éprouver nos moyens de protection, accroître les cyber-attaques et la désinformation afin de fragiliser la cohésion européenne, et contester les organisations et les traités internationaux. Elle est l’occasion pour les groupes terroristes comme Daech de relancer leur action, voyant dans la pandémie le signe d’une punition divine. L’instabilité et l’incertitude croissent : il n’y a plus d’espace protégé … sauf peut-être la station spatiale orbitale, et encore !

Défense et sécurité indivisibles


Dans cette situation alarmante, l’Europe doit se fixer un cap. Un nouveau cadre de la politique de défense et de sécurité commune doit être établi, en prenant en compte le territoire européen, car nombre de crises à venir impacteront directement notre sol. En d’autres termes, l’Europe pourra faire valoir à l’échelle du continent que la défense et la sécurité sont indivisibles et que la résilience de ses États est l’un de ses objectifs majeurs.

Le destin des européens est commun et doit nourrir la volonté de vivre ensemble. Photo UE

Il ne s’agit pas de déposséder les États membres de leur responsabilité en matière de défense, mais de permettre aux Européens de réaliser que leur destin est commun et doit nourrir la volonté de « vivre ensemble ». Comment imaginer que l’Union européenne ne puisse pas jouer un rôle plus important d’anticipation stratégique, de partage de l’information, de coordination de la réponse, puis de remontée en puissance ?

Cette inflexion impliquera plus de moyens partagés, notamment la création d’un espace de confiance, où s’échangeront l’analyse des risques, ainsi que les réponses que pourrait apporter l’Union avec le concours des États-Membres. Dans cette perspective, Bruxelles devra enfin disposer d’une véritable capacité opérationnelle intégrée de planification et de gestion de crise multisectorielle, avec une chaine de commandement militaire dotée de sa personnalité propre.

Le FED, pilier de l’autonomie stratégique


Pour contrer les conséquences de la crise économique à venir, les États doivent arrêter collectivement des mesures incitatives dans le domaine de la sécurité et de la défense. S’agissant des investissements de défense et contrairement à ce qui s’est fait en 2008, les arbitrages budgétaires nationaux à venir devront être coordonnés sur le plan européen, dans une logique de complémentarité et de partage. Les mesures incitatives proposées, dont certaines sont en cours de mise en place au sein de la Commission européenne, sont de trois ordres : le Fonds européen de défense, un fonds de relance général et un plan de relance industrielle dédié.

Soutenir les industries de Défense et leurs compétences. Photo Arquus

Le Fonds européen de défense, dont le principe a déjà été acté par les États membres, devra être suffisamment doté financièrement pour encourager la coopération européenne et dynamiser la compétitivité et la capacité d’innovation de l’industrie de défense européenne. L’autonomie industrielle de défense européenne en dépend. Le montant doit être voté prochainement dans le cadre du budget pluriannuel 2021-2027 de l’Union. Le fonds de relance, évoqué par la Commission, pourra apporter des moyens financiers considérables et solidaires au rétablissement des économies les plus affectées et au redémarrage de l’économie dans son ensemble, et du secteur de la défense en particulier.

Un plan de relance dédié au secteur de la défense


Enfin, un plan de relance industrielle, dédié au secteur de la défense et de la sécurité au sein de l’UE, devrait venir en complément. Il s’articulerait en deux phases : dans l’immédiat, un plan de sauvegarde des entreprises ; par la suite, un financement dédié à l’achat d’équipements stratégiques. Certains de ces équipements pourront être directement acquis par l’Union européenne elle-même, par exemple et en priorité des systèmes de surveillance terrestres ou spatiaux, à l’image de ce qui a été décidé en 2007 pour le programme Galileo. Directement acquis aussi des moyens de transport stratégique, des avions ou navires logistiques, voire des moyens sanitaires.

La crise sanitaire aura de lourdes conséquences. Aujourd’hui, plus que jamais, l’UE va se retrouver livrée à elle-même. Si elle veut répondre aux attentes et assumer ses responsabilités au regard de l’avenir de l’humanité, elle devra dorénavant compter sur ses propres forces. Dans un environnement de plus en plus menaçant, elle aura notamment comme première responsabilité d’assurer efficacement la sécurité globale de ses citoyens et la défense de leurs intérêts et de leurs valeurs, sur le continent et partout dans le monde. Les mesures présentées ici visent à compenser les effets de la récession économique, tout en optimisant les capacités de défense et sécurité, dans le respect de la souveraineté des États. C’est un enjeu de survie pour notre Europe et pour la civilisation dont elle est le cœur.

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(*) EuroDéfense-France est une association créée en 1994 qui « a pour but de susciter la prise de conscience des intérêts communs aux pays européens et de développer l’esprit de défense européen ».
EuroDéfense-France : Patrick Bellouard (Président), Nathalie de Kaniv, Maurice de Langlois, Patrick de Rousiers, Jacques Favin-Levêque, Patrice Mompeyssin, Jean-Paul Paloméros, Jean-Paul Perruche, Philippe Roger, Cyrille Schott.

Article paru initialement en mai 2020, dans La Tribune, sous le titre « Plan de relance : et si l’Union européenne achetait elle-même des équipements militaires ».

Bonne lecture et rendez-vous le 24 août 2020
avec le n°145 d’ESPRITSURCOUF
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